(Investir au Cameroun) - La Caisse autonome d’amortissement (CAA), qui assure au Cameroun les fonctions de dépositaire central des valeurs mobilières (DCVM), a annoncé le 22 janvier 2015 l’arrivée à son terme, depuis le 17 décembre 2014, de l’emprunt obligataire «IFC 4,25% 2009-2014». Une situation qui intervient, souligne la CAA, «à la suite du remboursement de l’intégralité du principal et du paiement de la dernière échéance aux investisseurs par la Société financière internationale, émettrice de cette valeur», a-t-on appris dans un communiqué officiel.
L’opération a sûrement été bénéfique pour les arrangeurs et chefs de file du placement de cet emprunt obligataire. Il s’agit notamment de la Banque internationale du Cameroun pour l’épargne et le crédit (BICEC), la filiale locale du groupe français Banque populaire ; EDC Investment Corporation, la branche investissement du groupe Ecobank ; et BGFI Bourse, la filiale intermédiation boursière du groupe BGFI. La mobilisation de l’épargne qui, au final, était garantie uniquement par la notation AAA de la SFI à l’exclusion de la Banque Mondiale (groupe mère de la SFI) et des gouvernements des pays membres de la CEMAC, a témoigné d’une certaine réussite, pour une première dans la sous-région.
Pour les investisseurs qui ont acheté des titres IFC (abréviation de SFI en anglais), l’affaire aura aussi été juteuse, car ils ont empoché (hors frais et taxes) des intérêts d’une valeur globale de 850 millions de francs Cfa en 5 ans. Mais au-delà de ces points positifs, le vrai bilan de l’opération est encore attendu. «Par le biais de cet emprunt obligataire, l’IFC contribuera au développement des marchés de capitaux locaux et soutiendra le financement à long terme en monnaie locale pour les sociétés locales», avait déclaré la vice-présidente pour les finances et trésorière d’IFC de l’époque, Nina Shapiro.
De ce point de vue, les avancées ont été peu nombreuses. Même si on a assisté à la multiplication de levées de fonds sur la Douala Stock Exchange, force est de constater que cette dernière peine encore à trouver une place de choix dans l’univers de l’intermédiation financière dans le pays. En effet, en plus de 10 ans d’existence, la DSX compte seulement 3 entreprises sur le compartiment actions, et les emprunts obligataires inscrits à sa côte ont été organisés par des Etats (Tchad et Cameroun), ou des institutions publiques (FAGACE et BDEAC).
Un privilège de grandes entreprises
On peut aussi relever le faible volume de négociation des titres sur son marché secondaire atone et assez morose. A côté du faible volume de l’activité boursière, des observateurs attendent aussi le bilan de l’opération sur le plan de l’intermédiation financière et de son impact sur l’atteinte des objectifs de développement. Selon des analyses faites par des regroupements de la société civile internationale, cet aspect des choses aura été moins visible dans le bilan de cette activité. En effet, très peu de PME et très jeunes entreprises auront finalement bénéficié de cet emprunt de la SFI, au contraire de structures plus solidement implantées.
Par exemple, on a vu la SFI intervenir dans des entreprises comme Activa Assurance (qui a déjà une certaine dimension), des projets comme celui de la centrale à gaz de Kribi avec AES Sonel récemment devenu Eneo, l’aménagement en vue d’une centrale hydroélectrique à Natchigal avec le groupe français EDF, ou encore l’entrée dans le capital de la structure de microfinance Advans Cameroun, qui bénéficie déjà d’une bonne fourchette d’investisseurs internationaux, dont la Banque européenne d’Investissement ou encore l’Agence française de développement.
La SFI devra donc davantage apporter des précisions sur le volume réel des PME et des petites initiatives (au sens local du terme), qui ont bénéficié de son emprunt obligataire 2009-2014. Elle devra, par ailleurs, démontrer comment cet engagement à leurs côtés, a été un levier essentiel pour le développement, soit local, soit global dans l’environnement de ces acteurs. Un exercice qui risque de révéler de nombreux défis et de soulever encore plus de questions.
Idriss Linge