logoIC
Yaoundé - 18 avril 2024 -
Economie

Budget 2022 : comprendre la loi de finances rectificative de l’État du Cameroun en sept tableaux

Budget 2022 : comprendre la loi de finances rectificative de l’État du Cameroun en sept tableaux

(Investir au Cameroun) - Comme prévu, en prélude à la session du parlement camerounais, qui s’ouvre le 7 juin 2022, le président de la République, Paul Biya (photo), a signé le 2 juin 2022 une ordonnance portant modification de la loi de finances 2022 de l’État, adoptée en novembre 2021 par les membres du parlement. Cette loi de finances rectificative, qui sera soumise à la sanction des députés et sénateurs au cours de la session qui s’ouvre dans quelques jours, vise à mettre le budget de l’État en cohérence avec la conjoncture internationale et les évènements locaux survenus entre sa promulgation et son exécution à mi-parcours.

À l’international, il y a principalement le conflit russo-ukrainien, qui a induit une hausse des cours mondiaux du pétrole et de bien d’autres matières premières, avec des impacts notables sur le fonctionnement des entreprises (surcoûts de production) et la gestion des finances publiques (explosion des subventions à la consommation des produits pétroliers à la pompe). Localement, la grogne des enseignants sous la bannière du mouvement « On a trop supporté », a occasionné des dépenses budgétaires imprévues, à travers notamment le décaissement de plusieurs milliards de FCFA pour satisfaire certaines revendications des seigneurs de la craie.

Une enveloppe en hausse de 328,3 milliards de FCFA (+5,7%)

En attendant son adoption par le parlement, le collectif budgétaire, décidé le 2 juin 2022 par ordonnance présidentielle, consacre une augmentation substantielle de l’enveloppe budgétaire de l’État. D’un montant initial de 5 752,4 milliards de FCFA, dont 5 599,7 milliards de FCFA pour le budget général et 152, 7 milliards de FCFA pour les comptes d’affectation spéciale, la nouvelle enveloppe est portée à 6080,4 milliards de FCFA, en hausse de 328,3 milliards de FCFA, soit 5,7% en valeur relative.

Cette enveloppe comprend 5977,7 milliards de FCFA de budget général, en hausse de 378 milliards de FCFA (+6,7%), et 102,7 milliards de FCFA de dotations pour les comptes d’affectation spéciale, en baisse de 50 milliards de FCFA. Ce qui correspond à une diminution de 32,7% en valeur relative.

Accroissement des recettes pétrolières de 43,4%

Selon le collectif budgétaire signé le 2 juin courant, les recettes fiscalo-douanières sont annoncées à la baisse, par rapport à la loi de finances initiale. De 3 188,7 milliards de FCFA au départ, elles culminent désormais à seulement 3 148,7 milliards de FCFA, en baisse de 40 milliards de FCFA. Cette baisse a certainement un lien avec la décision du gouvernement de réduire de 80% la valeur du fret à prendre en compte dans le calcul des frais de douane des marchandises importées par voie maritime et celle de réduire les valeurs imposables applicables à l’importation des produits pétroliers raffinés.

Au demeurant, cette réduction de l’enveloppe attendue de la douane et du fisc est fortement atténuée par l’explosion des recettes pétrolières. En effet, l’enveloppe attendue de ce poste, qui comprend les revenus de la vente du pétrole brut et du gaz naturel, puis les revenus issus de l’impôt sur les sociétés pétrolières, est désormais de 806 milliards de FCFA, contre 562 milliards de FCFA dans le budget initial. Cette augmentation de 244 milliards de FCFA (+43,4%) s’explique par l’embellie des cours mondiaux du brut depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine. En effet, alors que la loi de finances avait été établie sur la base d’un prix du baril à 64 dollars, le cours de l’or noir sur le marché international tourne autour de 100 dollars depuis plusieurs mois. À cela, il faut ajouter la hausse du cours du dollar. Le budget a été conçu sur la base d’un taux de change du dollar à 575,5 FCFA. Aujourd’hui, un dollar vaut plus de 600 FCFA.

Un endettement toujours croissant

L’enveloppe globale des emprunts (intérieurs et extérieurs) prévus au cours de l’exercice budgétaire courant passe de 1 754,5 milliards de FCFA dans le budget initial, à 1 868,5 milliards de FCFA dans l’ordonnance présidentielle portant collectif budgétaire de l’État, signée le 2 juin 2022. Ce qui révèle une augmentation de 114 milliards de FCFA.

Dans le détail, au lieu des 350 milliards de FCFA autorisés dans la loi de finances adoptée en novembre 2021, le collectif budgétaire du 2 juin porte le seuil des émissions des titres publics à 550 milliards de FCFA, soit une augmentation de 200 milliards de FCFA. En clair, le chef de l’État autorise le ministre des Finances à rechercher jusqu’à 200 milliards de FCFA de financements supplémentaires sur le marché local et sous-régional, afin de financer des projets d’infrastructures.

La surallocation de 35 milliards de FCFA demandée par le gouvernement au terme de son dernier emprunt obligataire de 200 milliards de FCFA laissait déjà présager une telle décision. Mais, plus concrètement, souffle une source autorisée au ministère des Finances, le Cameroun ayant été très dynamique aussi bien sur le marché des titres publics de la Beac que sur le marché financier au cours du premier semestre courant, il reste à mobiliser environ 120 milliards de FCFA pour atteindre le plafond autorisé dans le collectif budgétaire.

En ce qui concerne l’endettement extérieur, l’on note également que le collectif budgétaire que se préparent à examiner les parlementaires camerounais consacre une baisse des ressources à mobiliser auprès des partenaires internationaux, avec notamment une réduction de 56 milliards de FCFA sur les financements à encaisser au titre des appuis budgétaires.

Le fonds spécial Covid-19 s’amenuise, le test devient payant

Comme décidé depuis quelques semaines par le gouvernement, les tests PCR pour le dépistage du Covid-19 seront payant sur le territoire camerounais, dès l’entrée en vigueur de la loi de finances rectificative, qui entérine le prix de 30 000 FCFA déjà annoncé dans diverses correspondances gouvernementales.

Par ailleurs, l’ordonnance signée le 2 juin 2022 par le chef de l’État réduit de 50% l’enveloppe destinée au Fonds spécial de lutte contre le coronavirus et ses répercussions économiques et sociales. Celle-ci passe de 100 à seulement 50 milliards de FCFA. Par rapport à l’année 2021, au cours de laquelle l’enveloppe était de 200 milliards de FCFA, la baisse est de 150 milliards de FCFA.

49,5 milliards de FCFA de plus sur la masse salariale de l’État

En raison des prescriptions présidentielles visant à satisfaire les revendications des enseignants (paiement du reliquat des salaires pour les nouveaux contractualisés, liquidation des avancements et autres frais de relève, etc.), qui ont récemment organisé une grève générale dans le pays, le collectif budgétaire 2022 augmente l’enveloppe destinée à la prise en charge des personnels de l’État de 49,5 milliards de FCFA. Concrètement, celle-ci passe de 1 138,4 à 1 187,9 milliards de FCFA.

Une réduction du train de vie de l’État (-39,6 milliards FCFA)

Au cours de l’année 2022, l’État va finalement réduire de 39,6 milliards de FCFA ses dépenses dans les biens et services. Il s’agit principalement des dépenses dites « courantes » (-22,2 milliards de FCFA) ; des frais de transport et de mission (-3,6 milliards de FCFA) ; des achats des matériels et fournitures (-4,4 milliards de FCFA) ; des frais de consommation d’électricité, d’eau et de gaz (-2,7 milliards de FCFA) ; des frais de relations publiques, communication et formation du personnel (3,4 milliards de FCFA) ; des frais d’entretien et de maintenance (1,6 milliard de FCFA), etc.

360 milliards de FCFA supplémentaires pour les subventions

Dans le collectif budgétaire 2022, signé le 2 juin 2022, le chapitre intitulé « subventions et contributions » voit sa dotation budgétaire augmenter de 360 milliards de FCFA. Cette dotation passe ainsi de 265,4 à 625,4 milliards de FCFA. L’explosion de ce poste tient certainement de la décision prise par le gouvernement camerounais de ne pas augmenter les prix des produits pétroliers à la pompe, malgré une conjoncture internationale marquée par la hausse des prix du brut et du fret.

Selon les projections officielles, cette décision coûtera au Trésor public 672 milliards de FCFA de subventions. Dans le détail, dans le contexte international actuel, au cours de l’année 2022, l’État du Cameroun devra subventionner la consommation du super à 253 milliards de FCFA, 376 milliards de FCFA pour le gasoil, 43 milliards de FCFA pour le pétrole et 70 milliards de FCFA pour le gaz domestique.

Brice R. Mbodiam

Lire aussi :

02-06-2022 - Budget 2022 : ces modifications attendues au Cameroun du fait de la conjoncture internationale

capitalisation-boursiere-la-bvmac-toujours-loin-de-ses-objectifs-malgre-une-hausse-de-pres-de-37-en-2023
Selon le dernier rapport sur la politique monétaire de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac), publié en mars 2024, l’activité boursière dans la...
visas-d-etudes-en-france-erratum
Le communiqué "Visa d’études en France : 7 structures spécialisées dans la fourniture d'attestations de virement irrévocable reconnues illégales",...
cemac-les-projets-miniers-devraient-porter-la-croissance-moyenne-annuelle-a-3-7-entre-2025-et-2027-beac
Après un taux de croissance économique de 3,6% attendue dans la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Tchad, RCA et Guinée équatoriale) en 2024, soit son plus...
politique-d-import-substitution-le-secteur-prive-presente-ses-doleances-au-cameroon-investment-forum
Organisée par l'Agence de promotion des investissements (API), la quatrième édition du Cameroon Investment Forum (CIF) s'est ouverte le 17 avril 2024 à...

A la Une du magazine


Investir au Cameroun n121:Mai 2022

Les marges de progression du secteur télécom camerounais


Pourquoi les entreprises camerounaises cachent autant leurs comptes ?


Business in Cameroon n110: April 2022

Covid-19, war in Europe: Some Cameroonian firms will suffer


Albert Zeufack: “Today, the most important market is in Asia

  1. Plus lus 7 jours
  2. partagés 1 mois
  3. lus 1 mois
next
prev