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Yaoundé - 29 mars 2024 -
Energie

Électricité : l’application des tarifs revalorisés divise Eneo, l’Arsel et les transformateurs de l’acier

Électricité : l’application des tarifs revalorisés divise Eneo, l’Arsel et les transformateurs de l’acier

(Investir au Cameroun) - Comme ce fut déjà le cas pour les consommations du mois de janvier 2023, l’électricien Eneo a servi il y a quelques jours aux industries de transformation de l’acier, leurs factures d’électricité du mois de février 2023, avec les tarifs revus à la hausse, conformément à la décision prise par l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel). Et comme ce fut déjà le cas pour les factures de janvier, les industriels de l’acier pourraient une nouvelle fois payer ces factures de février sur la base de l’ancienne tarification, c’est-à-dire sans tenir compte de l’augmentation des prix.

C’est que, depuis la fuite de la décision d’augmentation des tarifs de l’électricité, prise le 12 décembre 2022 par l’Arsel, et applicable à compter du 1er janvier 2023, les industries de transformation de l’acier ont fait savoir leur opposition à cette mesure. Dans une correspondance adressée le 6 janvier 2023 au DG de l’Arsel, l’Organisation camerounaise des industries de transformation de l’acier (Ocita) sollicite d’ailleurs le retrait pur et simple de cette décision par le régulateur.

Cette opposition des plus grands consommateurs d’électricité au Cameroun parvient jusqu’aux oreilles du ministre de l’Eau et de l’Énergie, Gaston Eloundou Essomba, qui préside une réunion de crise sur le sujet le 19 janvier 2023, entre l’Ocita, le producteur d’électricité Eneo, la Société nationale de transport de l’électricité (Sonatrel) et l’Arsel. Selon les termes d’une nouvelle correspondance adressée au ministre le 2 mars 2023 par l’Ocita, au cours de la réunion du 19 janvier 2023, le membre du gouvernement a instruit l’ouverture des négociations entre les parties, et le retour vers lui pour la validation des conclusions prises d’un commun accord.

Conformément à ces instructions, apprend-on de sources proches du dossier, en date du 20 janvier 2023, une première séance de travail a été organisée à l’Arsel, au terme de laquelle les parties décideront d’effectuer ensemble une descente dans les industries de transformation de l’acier à Douala, pour mieux cerner les enjeux énergétiques autour de cette activité. « Au terme de cette descente, les options relatives à l’optimisation et la performance de la qualité de la fourniture énergétique ont été évoquées, sans aucune validation sur la question des prix, mais en identifiant les investissements à réaliser pour une bonne continuité de la fourniture en quantité et en qualité de l’énergie aux industries ; investissements pour lesquels la participation financière des industries contre compensation a été explorée. Nous avions alors convenu d’avancer sur le prix uniquement après évaluation du budget des investissements, la viabilité économique des prix appliqués, en respectant la contrainte légale d’homologation du prix final au consommateur à laquelle sont assujetties les industries de notre secteur », résume l’Ocita dans la lettre adressée au ministre Eloundou Essomba.

Le quitus de l’Arsel

Et l’interprofession des producteurs de fer à béton et autres matériaux de construction et agricoles à base de fer, de poursuivre : « alors même que les négociations restent pendantes, nous avons été surpris par l’émission par la société Eneo, pourtant participante active aux négociations en cours, des factures à nos entreprises aux tarifs contestés. Nos industries ont alors, en vertu de leur sens de respect des engagements, procédé au règlement sur la base tarifaire encore en vigueur, pour rester en cohérence avec vos instructions… ». Mais, avant de régler les factures du mois de janvier 2023 au tarif ne tenant pas compte de l’augmentation des prix, l’Ocita a d’abord saisi la société Eneo, pour demander le retrait des factures intégrant la hausse des tarifs.

« Nous ne saurions retirer les factures de consommation concernées, qui vous ont été servies, pour y appliquer les précédents tarifs en lieu et place de ceux applicables depuis le 1er janvier 2023, par décision signée de l’Agence de régulation du secteur de l’électricité. Nous n’avons dans le secteur de l’électricité ni les responsabilités sur la fixation des prix ni l’autorité d’aller à l’encontre d’une décision gouvernementale. Nous vous demanderons pour celles-ci de vous rapprocher de l’Arsel, qui dispose de toutes les prérogatives à cet effet. Toute décision qu’elle amendera ou actera nous parviendra par voie officielle pour application », répond Patrick Eeckelers, le DG d’Eneo, dans une correspondance adressée au coordonnateur de l’Ocita le 14 février 2023.

Retour de l’Ocita à l’Arsel, puis réponse du régulateur au DG d’Eneo, le 20 février 2023. « Faisant suite à plusieurs correspondances des industries de transformation de l’acier, dont l’Arsel a été mise en copie et dans lesquelles les industries contestent les factures du mois de janvier 2023 émises sur la base de la nouvelle grille tarifaire, j’ai l’honneur de vous préciser les points suivants qui avaient été discutés lors des différentes concertations tenues jusqu’ici : la décision (…) du 12 décembre 2022 fixant les tarifs de vente hors taxe pour les clients grands comptes (…), pour la période 2023-2025, est en vigueur depuis le 1er janvier 2023 ; l’émission des factures sur la base de la nouvelle grille tarifaire est conforme à la réglementation en vigueur… ; de façon transitoire, des mesures d’assouplissement dans l’implémentation de la nouvelle grille tarifaire (…) ont été arrêtées par l’ensemble des parties prenantes et devront être prises en compte dans la facturation et transcrites dans les différents contrats… », écrit Jean Pascal Nkou, le DG de l’Arsel.

Hausse des prix du fer à béton en perspective ?

Ce dernier demande cependant à la société Eneo d’assouplir les mesures de recouvrement, et de transmettre au régulateur les factures du mois de janvier 2023 adressées aux industriels de l’acier, « pour examen et vérification de la conformité avec les conclusions des concertations ». Cette réponse du régulateur, qui conforte Eneo dans sa position, semble avoir aggravé la grogne des industries de transformation de l’acier. « Nous avons été surpris de recevoir copie de la lettre de l’Arsel confirmant à Eneo cette pratique des prix pourtant contestés et inopposables à nos industries, en posture violation de vos instructions et de l’esprit de la négociation engagée sur vos instructions », éructe l’Ocita dans sa lettre au ministre du 2 mars 2023.

Face à ce qu’elle considère comme « une démarche déloyale, abusive et dictatoriale (…), alors même que la détermination des prix aux autres acteurs et corporations, dont les cimentiers, a fait l’objet de concertations préalables », l’Ocita sollicite un « ultime arbitrage » du ministre de l’Eau et de l’Énergie, en collaboration avec son collègue du ministère du Commerce, chargé de la régulation des prix aux consommateurs. Ceci afin que, apprend-on, « la sauvegarde du secteur de l’électricité n’impacte pas la survie des entreprises et l’augmentation des prix aux consommateurs ».

« Sur la seule année 2023, les industries de transformation de l’acier subissent la hausse des tarifs de l’électricité, du gasoil et du gaz industriel, à cause de l’extension de la taxe spéciale sur les produits pétroliers à ce produit. Si le gouvernement ne souhaite faire aucune concession malgré nos multiples sollicitations, qu’il consente à nous laisser répercuter nos surcoûts sur les prix du fer à béton, qui sont bloqués depuis plus de 10 ans, alors que les prix sortie-usine ne cessent d’augmenter, à cause des coûts de production qui s’envolent. C’est la raison pour laquelle nous sollicitons désormais l’implication du ministère du Commerce dans les concertations », précise Patrice Yantho, le coordonnateur de l’Ocita.

Brice R. Mbodiam       

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