(Investir au Cameroun) - Le gouvernement camerounais s’oppose à la hausse de 20% des tarifs du gaz naturel distribué à une trentaine d’entreprises industrielles dans la ville de Douala. Cette décision prise par le fournisseur Gaz du Cameroun (GDC), filiale locale du Britannique Victoria Oil & Gas (VOG), qui exploite les champs gaziers de Logbaba, dans la région du Littoral, est prévue pour entrer en vigueur le 1er juin 2023.
En effet, dans une lettre adressée le 30 mai 2023 au directeur général de GDC, le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga (photo), rappelle à ce dernier « qu’aux termes des dispositions pertinentes du décret no 2023/232 du 4 mai 2023 fixant les modalités d’application de la loi no 2019/008 du 25 avril 2019 portant Code pétrolier, le prix du gaz naturel commercialisé sur le marché domestique est soumis à la procédure d’homologation préalable. Vous voudrez bien, par conséquent, surseoir à votre décision d’augmentation de vos prix et me faire tenir, aux fins d’instruction, le dossier technique y relatif ».
En d’autres termes, en procédant unilatéralement à l’augmentation des prix du gaz naturel, GDC a enfreint la règlementation en vigueur au Cameroun. En effet, en son article 115, alinéa 2-a, le décret d’application du Code pétrolier du 4 mai 2023 stipule que « le prix du marché des hydrocarbures gazeux vendus sur le marché domestique est soumis à la procédure d’homologation préalable par le ministre chargé des prix », qui est le ministre du Commerce dans le cas présent. En fait d’homologation, il s’agit pour l’opérateur économique désireux de revaloriser ses prix de les soumettre préalablement à l’approbation du gouvernement, avec tous les éléments justificatifs de l’augmentation sollicitée. En fonction des contingences et des éléments justificatifs, le gouvernement peut alors simplement rejeter le projet, réduire la proportion de l’augmentation, ou alors l’approuver intégralement.
Hausse des coûts de production
Pour rappel, c’est dans une lettre adressée à ses clients le 15 mai 2023 que GDC a annoncé la hausse de ses tarifs de 20%, à compter du 1er juin 2023. L’entreprise explique cette « première augmentation des prix en 10 ans » par « la hausse significative de ses coûts opérationnels », en raison de la conjoncture globale. Cette décision unilatérale, que le gouvernement camerounais va réexaminer conformément à la règlementation, survient après l’extension au gaz naturel de la taxe spéciale sur les produits pétroliers (TSPP). Contenue dans la loi de finances 2023 de l’État du Cameroun, cette extension impose depuis janvier 2023 aux entreprises consommatrices de gaz industriel de payer au fisc une taxe de 70 FCFA pour chaque mètre cube de gaz consommé.
Dans le même temps, depuis janvier 2023, l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel) a également revu à la hausse de près de 30% les tarifs de l’électricité pour les clients « grands comptes », vocable regroupant les entreprises industrielles réputées énergivores. À cela, il faut ajouter l’augmentation depuis février 2023 des prix du super, du gasoil et du pétrole lampant utilisé par les industriels. Sur ces sources d’énergie, la proportion de l’augmentation des prix est respectivement de 15,8%, 25,2% et 36,5%.
L’explosion des coûts de l’énergie dans le secteur industriel au Cameroun depuis le début de l’année 2023 devrait avoir pour conséquence une augmentation beaucoup plus importante des coûts de production des entreprises tout au long de l’année courante. En 2022 déjà, révèle l’Indice des prix à la production industrielle (IPPI) publié par l’Institut national de la statistique (INS), les coûts de production dans les entreprises industrielles au Cameroun ont connu la plus forte augmentation depuis 6 ans, atteignant 13,3% en glissement annuel. Cette réalité est consécutive aux effets de la période post-Covid, aggravée par le conflit russo-ukrainien. À en croire les données de l’INS, deux principaux secteurs d’activités subissent particulièrement cette hausse des coûts de production au Cameroun. Il s’agit du secteur extractif (+29%), notamment l’industrie pétro-gazière, et du secteur de la sidérurgie-métallurgie (+16,9).
Brice R. Mbodiam
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