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Yaoundé - 24 avril 2024 -
Finance

Solomane Koné, DG Afrique centrale de la BAD : « La pandémie de Covid-19 sera très négative [pour] la zone CEMAC »

Solomane Koné, DG Afrique centrale de la BAD : « La pandémie de Covid-19 sera très négative [pour] la zone CEMAC »

(Investir au Cameroun) - Dans cette interview exclusive, le directeur général Afrique centrale de la Banque africaine de développement (BAD) analyse l’impact de la pandémie du coronavirus en Afrique centrale et dans la Cemac (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad) en particulier. Il fait également des projections pour la sous-région.

IC : Quelle est l’ampleur du choc lié à l’apparition de la pandémie de Covid-19 en Afrique centrale en général, et dans la zone CEMAC en particulier ?

SK : Le Covid-19 est une pandémie qui affecte toutes les économies du monde sans discrimination, avec bien sûr un impact négatif plus marqué sur les économies les plus fragiles. Celles-ci paient un lourd tribut. C’est le cas de la plupart des pays du continent. Les pays d’Afrique centrale notamment ceux qui font face à des situations de fragilité sociale, économique et sécuritaire sont davantage touchés. Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit une récession économique d’une ampleur phénoménale. Les pays d’Afrique centrale pour lesquels l’incidence de la pandémie de Covid-19 sera très négative sont ceux de la zone CEMAC, exportateurs nets de pétrole, car les cours mondiaux de l’or noir sont actuellement inférieurs aux prix de référence retenus dans leurs budgets respectifs.

La Banque africaine de développement a identifié au moins cinq principaux domaines d’impact de la pandémie sur les pays africains. Il s’agit de la baisse des cours des matières premières et leurs effets induits sur les exportations et le commerce international des pays de la région. Il y a aussi la baisse des flux touristiques en raison des restrictions de voyage et des annulations d’hébergements et de services hôteliers. Nous notons aussi la baisse des investissements directs étrangers et la chute des flux sur les marchés financiers ainsi que l’impact sur les budgets dédiés à la santé et à l’éducation. Ces secteurs n’étaient d’ailleurs pas les mieux lotis même si des efforts avaient été réalisés dans le cadre des différents programmes de réforme.

Au-delà de ces appréciations qualitatives, qui restent pour l’instant et pour la plupart optimistes et spéculatives, la Banque est actuellement à pied d’œuvre pour déterminer des projections chiffrées de l’impact de cette crise sanitaire sur les économies des pays du continent. Les efforts de la CEMAC nous donnent une idée des estimations de l’ampleur de l’incidence quantitative de cette pandémie, en termes de perte de taux de croissance, de détérioration des finances publiques (dégradation du solde budgétaire) et du commerce extérieur (dégradation du solde courant).

Au niveau du secteur réel, les économies de la région devraient enregistrer une baisse de leur taux de croissance. En effet, les perspectives de croissance à moyen terme en Afrique centrale, avant la pandémie de Coronavirus, étaient favorables. Ainsi, selon les projections initiales de la Banque, les taux de croissance pré-Covid-19 du PIB réel devaient s’établir en 2020 à 3,4 % pour la zone CEMAC et à 3,5 % pour toute la région Afrique centrale, c’est-à-dire la zone CEMAC plus la République démocratique du Congo. Mais ces perspectives pourraient être plus sombres avec l’avènement de cette pandémie. Pour vous donner une idée, les nouvelles projections de la CEMAC indiquent que le taux de croissance de la zone s’établirait, dans une hypothèse optimiste de maîtrise de la situation à court terme, à -1,6% en 2020, soit une baisse de 4,9% comparativement aux projections initiales pré-Covid-19 de 3,3%. Pour la RDC, la Banque mondiale anticipe une baisse de 2,8% par rapport à ses projections initiales pré-Covid-19, pour s’établir à 0,4% en 2020.

Cette perte de croissance pourrait être causée par un recul de la production, compte tenu de la baisse des prix des matières premières, notamment du pétrole, dont la région est exportatrice nette. La région pourrait enregistrer des faillites d’entreprises et des pertes d’emplois. Le ciblage des mesures gouvernementales pour ce segment doit faire l’objet d’une attention particulière. Au niveau des prix, un double effet pourrait se produire, dont la résultante dépendra du niveau de perturbation des chaînes d’approvisionnement, non seulement sur le plan international, mais également au niveau national. Il s’agit notamment du recul des tensions inflationnistes en relation avec la contraction de la demande intérieure et d’une exacerbation de ces tensions si les approvisionnements en biens et services ne sont pas convenablement assurés.

Au niveau des finances publiques, les soldes budgétaires devraient connaître une détérioration significative. Les projections pré-Covid-19 prévoyaient en 2020 un excédent budgétaire en Afrique centrale de l’ordre de 0,5% du PIB pour toute la région et de 0,9% pour la zone CEMAC. Les projections post-Covid-19 de la CEMAC indiquent que le solde budgétaire global de la zone se creuserait plutôt de 7,5% du PIB pour s’établir à -6,6% du PIB. Cette détérioration des finances publiques résulterait à la fois de la baisse des recettes budgétaires (consécutivement à la baisse des cours des matières premières et de la baisse de l’assiette fiscale fondée sur l’activité économique en pleine contraction significative), ainsi que d’une augmentation relative des dépenses publiques (compte tenu notamment de l’augmentation potentielle des dépenses liées aux systèmes de santé et de soutien aux secteurs les plus touchés par la pandémie).

Concernant le secteur extérieur, le solde courant de la région devrait sans surprise se détériorer davantage. Les projections initiales de la BAD avaient prévu, pour 2020, un solde courant déficitaire de 2,8% du PIB pour l’Afrique centrale et de 2% pour la CEMAC. La révision de ces projections après l’avènement du Covid-19 indique que le déficit du solde courant se creuserait davantage de 8,6% pour s’établir à 10,3% du PIB, en lien avec la détérioration des termes de l’échange, la baisse des exportations et une possible progression des importations. Ainsi, le creusement du déficit courant pourrait se traduire par une forte baisse des réserves de change. Par ailleurs, la diminution des recettes d’exportation et budgétaires pourrait impacter la capacité des pays à honorer le service de la dette extérieure d’où la pertinence des propositions de certains gouvernements du G20 et d’institutions multilatérales en faveur des rééchelonnements et des remises de dettes.

tableau 1

IC : La Banque africaine de développement prévoit-elle un plan de soutien aux pays de la CEMAC et de l’Afrique centrale ? Si tel est le cas, comment sera-t-il mis en œuvre ?

SK : La réponse à cette question est oui sans aucune ambigüité. Non seulement la Banque africaine de développement a prévu un plan de soutien aux pays de la région, mais aussi aux 54 pays membres régionaux du continent. Nous avons une responsabilité et une solidarité à l’égard de nos pays membres régionaux (PMR) que nous devons assumer et nous allons le faire.

La Banque vient tout juste de lancer un nouvel instrument de financement pour permettre aux 54 PMR de faire face à la pandémie de coronavirus, appelé Facilité de réponse rapide au Covid-19 (CRF). Il s’agit d’un fonds doté d’environ 10 milliards de dollars américains destinés non seulement aux États, mais aussi au secteur privé. Ce fonds, en coordination avec les initiatives des pays et des autres partenaires techniques et financiers, devra permettre de contenir l’impact économique et social de la pandémie de Covid-19 sur les populations africaines. Elle permet de fournir aux PMR des liquidités pour subvenir à leurs besoins financiers urgents et immédiats et maintenir les services gouvernementaux essentiels dans ces circonstances que nous savons extrêmement fragiles et défavorables.

Cette Facilité se décompose comme suit :

  • 5,5 milliards de dollars (55%) sont dédiés aux opérations souveraines du guichet du Groupe de la Banque africaine de développement, c’est-à-dire, les opérations engagées avec et par les États pour les pays à revenu intermédiaire, comme c’est, par exemple, le cas du Cameroun, du Congo, du Gabon, et de la Guinée équatoriale.
  • 3,1 milliards de dollars (31%) sont destinés aux opérations souveraines et régionales pour les pays ayant accès à notre guichet concessionnel, le Fonds africain de développement, qui répond également aux États en transition ou encore considérés comme des États fragiles, en particulier la République centrafricaine, la République démocratique du Congo et le Tchad pour ce qui concerne notamment l’Afrique centrale.
  • 1,35 milliard de dollars (14%) seront enfin consacrés aux opérations du secteur privé.

Ce fonds devrait permettre à la Banque d’apporter un soutien aux économies africaines à trois niveaux : aider les pays à stabiliser leur situation macroéconomique par des appuis budgétaires à décaissements rapides ; soutenir le secteur privé et en particulier les PME et accélérer l’exécution des projets d’investissement en cours, à fort impact social dans des domaines tels que l’agriculture, l’eau et le secteur privé.

Pour ce qui concerne le cas spécifique de la région opérationnelle Afrique centrale de la Banque africaine de développement, qui couvre les 6 pays de la CEMAC et la RDC, la Banque met dans l’immédiat à la disposition de la région, un don d’environ 11 millions de dollars dans le cadre d’un projet régional d’urgence pour appuyer les différents plans de riposte régionaux et nationaux pour contrer le Covid-19 en Afrique centrale et aussi aider l’Organisation de coordination des endémies en Afrique centrale (OCEAC) dans ses efforts de coordination au niveau de la CEMAC.

IC : La politique de la Banque sera-t-elle modifiée dans la zone du fait de la pandémie ? Si tel est le cas, de quelle façon ?

SK : La politique de la Banque reste toujours guidée par ses cinq priorités opérationnelles dénommées « Top 5 » ou « High 5 », à savoir : « Éclairer l’Afrique », « Nourrir l’Afrique », « Industrialiser l’Afrique », « Intégrer l’Afrique » et « Améliorer les conditions de vie des Africains ». Et bien entendu, dans un pays ou une région donnée, ces priorités sont alignées sur les priorités stratégiques du pays ou de la région en question à travers les Documents de stratégie pays et régional.

L’avènement du Covid-19 a modifié l’ordre des priorités dans tous les pays du monde, y compris ceux de l’Afrique centrale. Dans l’immédiat, nous devons faire face à l’urgence dans la solidarité, la responsabilité mutuelle et la transparence. Faire face à la pandémie en cours et lui opposer une réponse appropriée est devenue la priorité principale. Il est donc tout à fait normal que la Banque s’adapte pour mieux soutenir les économies des pays qu’elle couvre. Ainsi, face à ce choc exogène et à ses effets, la Banque se doit de réagir vigoureusement et rapidement afin d’apporter une réponse appropriée et à temps opportun. À cet égard, la Banque a décidé d’aller beaucoup plus vite dans la préparation et la mise en œuvre de ses opérations retenues dans le cadre de cette pandémie. C’est ainsi qu’elle a revu ses procédures d’approbation en les ramenant a quelques jours seulement.

Le programme de travail de la Banque a ainsi connu des modifications importantes pour s’adapter aux nouvelles priorités des États dans la situation d’urgence, tout en ne perdant pas de vue les contraintes structurelles qui restent d’actualité, mais que nous devons réexaminer avec les différents gouvernements et autres partenaires techniques et financiers. En de pareilles circonstances, la flexibilité doit être de mise tout en restant efficace. Les effets du Covid-19 sur l’emploi, les finances publiques, les réserves de change et le secteur privé sont déjà importants et pourraient s’amplifier si la pandémie n’est pas contenue très rapidement. Le dialogue que la Banque mène avec chacun des États devrait aboutir à orienter vers des secteurs devenus prioritaires, non seulement les nouvelles ressources qui seront mises à disposition par la Banque, mais aussi les ressources existantes sur des projets qui sont en cours.

Parallèlement, les échanges avec les autres partenaires au développement se poursuivent afin d’apporter une réponse coordonnée et efficace à la crise sanitaire et à ses conséquences économiques, sociales et financières.

IC : Y a-t-il une sorte de Plan Marshall prévu pour l’Afrique centrale en général, et la zone CEMAC en particulier ?

SK : Vous l’avez déjà relevé, dans le cadre de la riposte contre la pandémie de Covid-19, la Banque interviendra rapidement avec un fonds de 10 milliards de dollars. Le Plan Marshall, longtemps sollicité à juste titre pour le continent, reste d’actualité.

Au-delà de la pandémie, l’Afrique centrale est confrontée à d’énormes défis auxquels nous devons faire face. La question n’est donc pas tant d’avoir un Plan Marshall, sans une stratégie claire, mais d’être informé des défis et faiblesses de la région, en vue de prendre des initiatives idoines. En effet, les perspectives à moyen terme de la région pourraient être négativement touchées par des facteurs externes et internes.

Au niveau externe, le ralentissement de la croissance mondiale anticipée pour 2020 et 2021, et en particulier celle de la Chine, un partenaire majeur de la région, premier épicentre de l’épidémie de coronavirus, devrait s’accompagner d’une réduction des investissements en Afrique centrale et d’une diminution des exportations de la région, réduisant ainsi la vigueur de la croissance. Au niveau interne, l’insécurité et l’instabilité politique dans certains pays pourraient continuer de nuire à la croissance économique dans la région et rendre plus difficile la gestion de la pandémie du coronavirus et post-Covid-19.

Les problèmes de gouvernance économique et la détérioration du climat des affaires constituent aussi des enjeux de taille. La résorption des déséquilibres et le maintien de la stabilité des cadres macroéconomiques devraient être de rigueur afin de pallier les dérapages budgétaires et les crises d’endettement de la région.

En outre, la dépendance de la région aux ressources naturelles continue de constituer un important facteur de fragilité des économies. Il y a nécessité d’engager des efforts de transformation structurelle et de diversification des économies afin d’assurer une meilleure résilience aux chocs. L’insuffisance, le mauvais état et le manque d’infrastructures (transport, eau, électricité, TIC, etc.) pour soutenir et accompagner l’activité de production constituent un frein à la transformation structurelle. Sans s’attarder sur les questions de fiscalité qui restent réelles, le déficit infrastructurel ne fournit pas aux entreprises les conditions idoines de leur croissance et de leur compétitivité, et entraîne une augmentation du coût des facteurs de production. Le partenariat public-privé devrait être envisagé, étant donné la faiblesse des ressources publiques face à l’ampleur des besoins. En outre, la persistance d’épidémies dans certaines zones, les effets du changement climatique et des autres perturbations écologiques ont une incidence négative sur la production de la région. Enfin, l’un des défis majeurs de l’Afrique centrale reste la faiblesse du capital humain. Cette crise du Covid-19 doit nous donne une opportunité réelle pour nous attaquer aux questions structurelles liées aux systèmes de santé, d’éducation et de protection sociale.

En somme, les principales recommandations de politique économique en Afrique centrale dans le court et moyen terme devraient donc consister à prendre des mesures sanitaires et économiques appropriées en vue de contenir les effets de la pandémie de coronavirus sur les pays. Il s’agira aussi de consolider la paix, la sécurité et la stabilité et renforcer la gouvernance économique en poursuivant les efforts d’assainissement du cadre macroéconomique et du climat des affaires et promouvoir la diversification économique. Il faudrait aussi investir dans les infrastructures, améliorer la mobilisation des ressources intérieures, juguler les effets du changement climatique, développer le capital humain et promouvoir des emplois décents.

La bonne nouvelle est que la Banque est bien consciente de ces défis et est disposée à accompagner l’Afrique centrale. La Banque s’y attèlera non seulement à travers ses stratégies nationales consignées dans les Documents de stratégie pays (DSP), mais aussi dans son Document de stratégie d’intégration régionale pour l’Afrique centrale (DSIR-AC). Cette dernière a été adoptée en février 2019 et couvrira la période 2019-2025. Pour les pays, 4 parmi les 7 de la région travaillent actuellement à préparer les prochains DSP qui couvriront la période 2021-2025. Il s’agit d’une bonne occasion pour le Cameroun, le Gabon, le Tchad et la RDC de faire le point de ce qui constituera la base de son développement. La Banque, pour sa part, sera à ces rendez-vous pour le développement.

IC : Doit-on craindre un enlisement de la crise dans la sous-région avec des États qui recourent à la dette pour lutter contre la pandémie ?

SK : Nous pensons qu’avec le concours de tous, l’Afrique centrale, comme tout le reste du monde, devrait sortir de cette crise sanitaire. Quant à la question de la dette, il y a effectivement des réflexions importantes en cours notamment pour les pays les plus fragiles, allant du moratoire à l’annulation. Ces questions restent légitimes. La Banque soutient et est partie prenante de ces discussions importantes. Pour notre part et pour l’instant, nous nous assurons d’un transfert net positif des ressources en faveur de nos pays membres régionaux dans le cadre de nos appuis face au Covid-19.

La coordination étroite entre les partenaires au développement et les États est un gage pour assurer un soutien adapté et efficace à ces États. Il est clair que les nouvelles contributions des partenaires au développement à l’endroit des pays de la région tiennent compte de la situation macroéconomique et financière qui prévalait dans ces pays avant la crise. Les bons résultats des réformes économiques réalisées avec succès par les pays, dans le cadre du Programme de réformes économiques et financières de la CEMAC (PREF-CEMAC), méritent d’être consolidés et amplifiés. Ce programme, conduit par le FMI et soutenu par divers partenaires, y compris la Banque africaine de développement, a abouti, dans certains pays et au niveau régional, à un retour de la croissance, à une réduction des déficits budgétaires et à une reconstitution des réserves de change. À titre d’exemple, au Cameroun, le PREF-CEMAC a permis d’injecter 410,4 millions d’euros, soit environ 269,2 milliards de FCFA entre 2017 et 2019.

Bien que nous soyons dans l’urgence, le plan d’intervention global de la Banque intègre les priorités des États à court, moyen et long terme. La Banque apporte non seulement des ressources aux États, mais aussi un conseil coordonné avec les autres partenaires au développement, qui est particulièrement important en temps de crise.

IC : Les projets de la Banque africaine de développement dans l’intégration sous-régionale, l’agriculture et les infrastructures, seront-ils maintenus ? Quel est son portefeuille actif ?

Effectivement, plus que jamais, nos projets régionaux continueront d’être exécutés et nos équipes travaillent activement à minimiser les répercussions de cette crise sur leurs calendriers d’exécution. L’avenir de nos pays réside en notre capacité commune et consensuelle à nous attaquer aux grands défis structurels de transformation et d’émergence des économies, telle que prônée par les différents Plans de développement économique des États.

Le président de la Banque, Dr Akinwumi Adesina, a donné des instructions claires dans ce sens. Là où il le faut, des ajustements sont en train de se faire pour optimiser les ressources et les procédures d’approbation et de décaissement. Nous devons faire face de manière efficace et responsable aux besoins pressants de nos pays membres en cette période inédite, tout en étant conscients des défis structurels que nous devons relever ensemble.

Nous avons des projets d’appui à la BEAC pour le marché financier unifié. Il est prévu dans le cadre du projet régional d’urgence que l’OCEAC bénéficie d’une contribution d’urgence pour mettre en place un système régional de surveillance épidémiologique, tout en incluant des appuis ciblés aux Plans nationaux d’urgence de riposte au Covid-19 dans les États membres de la CEMAC et de la RDC. Par ailleurs, la Banque est en train d’instruire une opération de soutien au marché de la pension livrée dans la zone CEMAC. Ce projet devra éventuellement aider les acteurs non bancaires à avoir accès au marché monétaire à des coûts favorables, mais aussi de fournir de la liquidité aux banques commerciales, de soutenir le marché obligataire tout en renforçant les réserves de change, dont la sous-région CEMAC a tant besoin en ce moment très critique.

À côté de ces initiatives, se réalisent et se préparent de grands projets d’infrastructure que nous portons et que nous promouvons en tant que leader dédié par les instances appropriées de l’Union africaine. Nous voulons boucler les financements nécessaires avec d’autres partenaires, y compris le secteur privé. Il est important de garder le cap afin de maintenir l’engagement de ces partenaires. Les populations vivant dans les zones d’influence de ces projets sont en attente des effets positifs pour l’amélioration de leurs conditions de vie. Nous leur devons cela. Cependant, ensemble et de manière solidaire et responsable, nous devons faire face à l’urgence du Covid-19 pour préserver les acquis.

En termes plus concrets, nous restons concentrés sur les 12 projets régionaux actuellement en cours dans la zone CEMAC :

  1. Construction d’un pont sur le fleuve Ntem et facilitation du transport, et de la sécurité routière sur la route transnationale Kribi-Campo-Bata reliant le Cameroun et la Guinée équatoriale.
  2. Construction de la voie express Lolabe-Campo (40 km) entre le Cameroun et la Guinée équatoriale.
  3. Construction de la route Ndende-Doussala (144 km) entre le Gabon et le Congo.
  4. Construction de la route Kogo-Akurenam (Sud-Est Guinée équatoriale – Gabon).
  5. Corridor Brazzaville-Ouesso-Bangui-Ndjamena (Congo/RCA/Tchad).
  6. Construction de la route Mbaikoro-Bendja-Bekoninga frontière RCA (109 km) (Tchad/RCA).
  7. Aménagement hydroélectrique de Chollet et des lignes électriques (Cameroun/Congo/Gabon/RCA).
  8. Interconnexion des réseaux électriques entre le Cameroun et le Tchad.
  9. Interconnexion du Cameroun avec les pays de la CEMAC par la fibre optique.
  10. Construction du port sec de Beloko (Corridor Douala - Bangui).
  11. Construction du port sec de Dolisie (Corridor Gabon - Congo).
  12. Université inter-États (Cameroun - Congo).

Le coût estimatif global de ces projets s’élève à 2 819,2 milliards de FCFA, dont 255,8 milliards de FCFA de ressources ont déjà été mobilisées par les États membres et par les partenaires techniques et financiers. Les financements restant à mobiliser auprès des partenaires techniques et financiers s’élèvent à 2 563,4 milliards de FCFA. Il est à noter que certains projets dans les domaines de l’électricité, de la fibre optique et des infrastructures portuaires sont de nature à intéresser des investisseurs pour la structuration en partenariats publics et privés (PPP). Cette configuration atténuerait les besoins à couvrir par des emprunts auprès des bailleurs.

IC : L’Afrique centrale pourra-t-elle se relever de tous ces chocs ? Comment ?

SK : Nous n’avons aucun doute et restons prioritairement concentrés sur l’urgence pour préserver les acquis. En effet, non seulement l’Afrique centrale a les moyens de se relever, mais elle se relèvera à l’instar du continent. Restons solidaires, responsables et agissons de manière coordonnée avec les autres partenaires. La Banque africaine de développement est aux côtés de la sous-région pour l’appuyer comme elle le fait d’ailleurs à l’occasion de la préparation de la riposte à la pandémie du coronavirus.

Par ailleurs, comme indiqué précédemment, au-delà de la pandémie, ce sont des questions plus structurelles, auxquelles il faudra s’attaquer. La crise sanitaire a révélé aussi le besoin d’espaces sous-régionaux capables de satisfaire la plupart de leurs propres besoins immédiats, notamment alimentaires et sanitaires, plutôt que de dépendre d’importations de pays lointains et de risquer de perdre du temps en chemin.

Entretien mené par Sylvain Andzongo

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