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Yaoundé - 09 décembre 2023 -
Gestion publique

Taxe foncière : les propositions du Gicam pour approcher le potentiel de recettes estimé à 100 milliards de FCFA

Taxe foncière : les propositions du Gicam pour approcher le potentiel de recettes estimé à 100 milliards de FCFA

(Investir au Cameroun) - En août 2023, au cours d’une concertation entre la direction générale des impôts (DGI) du ministère des Finances et le secteur privé, rencontre relative à l’élaboration de la loi des finances 2024, le Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam) a formulé un ensemble de propositions au gouvernement. Selon le document rassemblant aussi bien ces propositions que des récriminations au sujet de l’administration de l’impôt dans le pays, la principale organisation patronale du Cameroun s’attarde, par exemple, sur la taxe sur la propriété foncière (TPF), dont « le rendement est encore très faible, comparé au parc immobilier du Cameroun ».

La TPF s’applique à toute personne morale ou physique propriétaire « de fait ou de droit » d’un bien immobilier situé au Cameroun. Elle est payée au taux de 0,1% de la valeur de l’immeuble. Malgré la réforme engagée depuis 2014, la DGI peine à collecter 4 milliards de FCFA de recettes alors que des sources internes au fisc évaluent le potentiel de la TPF à 100 milliards de FCFA par an. Selon le rapport décennal 2010-2020 de la DGI, les recettes de la TPF ont atteint leur plus haut niveau en 2016 avec une collecte de 3,9 milliards de FCFA. Depuis lors, elles ne font que décliner et sont tombées à 2,2 milliards de FCFA en 2019.

Pour en faire une importante source de recettes fiscales, comme l’a souhaité l’État lui-même au moment de l’instauration de cette taxe, le Gicam fait trois propositions au gouvernement. Premièrement, l’organisation patronale suggère de « rendre obligatoire la présentation au notaire du numéro d’identifiant unique (NIU) de chaque partie à une transaction immobilière. Ce qui permettra leur localisation et leur suivi ». Ensuite, le Gicam demande de « revoir à la baisse les taux des droits d’enregistrement relatifs aux baux d’habitation, dont le preneur est un particulier, dans le but de faciliter leur présentation à l’enregistrement, et par conséquent, d’avoir l’information sur le propriétaire… ». Sur ce volet, la première organisation patronale du Cameroun suggère la réduction des frais d'enregistrement des baux des particuliers de 80%, passant ainsi de 5% à seulement 1% de la base imposable.

Enfin, l’organisation patronale invite le gouvernement à impliquer les collectivités territoriales décentralisées (CTD) dans la stratégie de collecte de cet impôt. Concrètement, il est question, selon le Gicam, d’intégrer les CTD dans la chaine de communication de l’information foncière, « en raison de leur facilité à recouper l’information ».

Absence de transparence sur la propriété foncière

Pour l’heure, rien ne garantit que l’implémentation de ces mesures préconisées par le patronat changera le sort de la taxe foncière, dont la collecte au Cameroun s’apparente à un véritable casse-tête pour le gouvernement. Après la stratégie foireuse du porte-à-porte, les tentatives d’aguicher les contribuables par des amnisties en cas de déclaration spontanée, le gouvernement a cru avoir trouvé la bonne parade en 2017, en proposant de coupler le paiement de cette taxe aux paiements mensuels de la facture d’électricité. Après avoir reculé suite à une instruction présidentielle cette année-là, le gouvernement est revenu à la charge dans le projet de loi des finances 2023 avec la même proposition, assortie cette fois-ci de quelques aménagements. Mais, celle-ci n’a pas prospéré non plus.

C’est que, indépendamment de la pertinence de cette taxe encouragée par le FMI, qui y voit non seulement une opportunité d’augmentation des recettes non pétrolières, mais aussi une occasion idoine pour garantir la transparence sur la propriété immobilière au Cameroun, les modalités de sa collecte, telles qu’édictées par le gouvernement, portent les germes d’une implémentation difficile. D’abord, en raison des difficultés d’accès aux documents officiels tels que les titres fonciers, les certificats de propriété ou encore les permis de bâtir. En effet, dans de nombreux cas, à cause des tracasseries et lenteurs administratives, il faut souvent attendre de nombreuses années pour disposer d’un ou tous ces documents. Pourtant, la réforme envisagée fait obligation au redevable de la taxe foncière, de « fournir les références de son titre de propriété ou de tout autre document en tenant lieu », au moment « de sa déclaration en ligne ».

Ensuite, la collecte de la taxe foncière, telle que proposée par le gouvernement, est assujettie à une étroite collaboration entre plusieurs acteurs. Ce qui n’est pas gagné d’avance. « Les services en charge du cadastre, des affaires foncières et les services techniques des collectivités territoriales décentralisées, émetteurs des titres de propriété, des permis de bâtir ou d’implanter, des devis de construction et autres documents assimilés, sont tenus d’en adresser copie à l’administration fiscale dans les trois mois de leur établissement (…) les notaires sont tenus de transmettre par voie électronique à l’administration fiscale, l’état des mutations de propriétés dressées par leurs soins, dans un délai de trois mois à compter de la signature desdits actes », peut-on lire dans le projet de loi de finances 2023, qui met ainsi en exergue la partition que devraient jouer des acteurs parfois accusés d’être les principaux fossoyeurs de la transparence en matière foncière.

Enfin, s’exprimant sur le projet gouvernemental de coupler le paiement de la taxe foncière à la facture d’électricité, l’inspecteur principal des impôts, Alain Symphorien Ndzana Biloa, fait remarquer que 70 à 80% des abonnés de la société d’électricité Eneo sont des locataires, et donc ne sont pas redevables de la taxe foncière. Mieux, la majorité d’entre eux ne dispose pas de contrat de bail pouvant justifier leur statut de non-propriétaire face au fisc. En effet, fait observer un agent du fisc, déjà peu habitués à signer des contrats de bail avec leurs locataires, les propriétaires immobiliers sont devenus encore plus réticents à signer ce document depuis la mise en œuvre par l’État de mesures visant à collecter davantage la taxe foncière.

Brice R. Mbodiam 

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