(Investir au Cameroun) - Dans le cadre du Débat d’orientation budgétaire (DOB), préparatoire au projet de la loi de finances 2023, le ministre des Finances, Louis Paul Motaze, a une nouvelle fois exprimé, le 5 juillet au Parlement, la volonté du gouvernement de supprimer des exonérations fiscales sur les produits de grandes consommations importés (riz, poisson et blé).
« Il sera question entre autres pour le gouvernement de procéder à une revue systématique de toutes les dépenses fiscales existantes, en vue de la suppression des exonérations fiscales inefficaces ou peu pertinentes au regard de l’évolution des politiques publiques. Par exemple, l’accompagnement de la politique d’import-substitution voulue par le gouvernement impose que les exonérations sur certains produits, qui grèvent en balance commerciale et sont ciblés dans le cadre de cette politique, tels que le riz, le poisson et le blé, soient aujourd’hui réduites ou progressivement supprimées », a déclaré le ministre des Finances. Il indique que cette suppression projetée vise à favoriser la compétitivité locale à plus grande échelle de ces biens.
Seulement, ce n’est pas la première fois que l’on entend un tel discours sans en percevoir les effets. En 2019 par exemple, toujours dans le cadre du DOB, le gouvernement camerounais annonçait déjà la restauration graduelle des droits de douane sur les produits défiscalisés (riz, blé, poisson, etc.). Et en contrepartie, il était prévu d’affecter éventuellement une partie du produit subséquent à des fonds de développement local de ces filières. Mais à l’arrivée, ces annonces ne sont pas matérialisées dans la loi de finances 2020.
Mise en garde du FMI
En 2020, le gouvernement avait annoncé qu’il réduirait la dépense fiscale dans le cadre de la loi de finances 2021. Il était ainsi prévu : la hausse du droit de douane de 5% à 10% pour le poisson et le riz, une augmentation du droit de douane de 0% à 5% pour le blé ; une hausse du droit de douane de 5% à 30% pour le maïs et les tourteaux de soja. Toutes ces mesures n’ont pas été exécutées sans explications officielles.
Mais une explication sur les multiples rétropédalages du gouvernement se trouve peut-être dans une note produite en 2020 par le Fonds monétaire international (FMI). Dans ce document, le FMI estime que, la suppression de certaines exonérations pourrait certes accroître les recettes et réduire les risques de corruption au Cameroun. Mais l’institution note que la plupart des exonérations fiscales s’appliquent à des denrées alimentaires de base (poisson, riz, blé et lait). « Compte tenu de la situation sécuritaire et sociopolitique, il est délicat de les réduire », estime l’institution de Bretton Woods.
Pour l’heure, indique le ministère des Finances, les exonérations fiscales sur le blé font perdre à l’État près de 15 milliards de FCFA par an. La taxation du riz et du poisson à un taux réduit du Tarif extérieur commun (5% contre le taux normal de 20%) engendre respectivement des manques à gagner de près de 28 milliards et 16 milliards de FCFA par an.
Sylvain Andzongo
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