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Yaoundé - 26 septembre 2023 -
Gestion publique

La CNPS obtient le report de la collecte de l’impôt sur les pensions retraite et échappe à un redressement de 25,6 milliards

La CNPS obtient le report de la collecte de l’impôt sur les pensions retraite et échappe à un redressement de 25,6 milliards

(Investir au Cameroun) - Dans une lettre adressée le 6 septembre 2023 au directeur général de la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), Alain Olivier Noël Mekulu Mvondo, le ministre des Finances, Louis Paul Motazé, met un terme au bras de fer qui oppose depuis plusieurs mois le fonds public de pension du Cameroun à la direction générale des impôts (DGI). « J’ai l’honneur de vous faire connaître que vos arguments ont été reconnus fondés. En effet, la loi fiscale étant d’interprétation stricte, la législation fiscale en vigueur ne fait pas de vous, le redevable légal (le collecteur, NDLR) de l’IRPP (impôt sur le revenu des personnes physiques) sur les pensions servies, tel qu’il ressort des termes de l’article 81 du Code général des impôts », écrit le ministre Motazé, qui a aussitôt annulé les effets du redressement fiscal de 25,6 milliards de FCFA effectués sur la CNPS par la DGI, au prétexte que depuis plusieurs années, cette société d’État ne collectait pas l’IRPP sur les pensions retraite qu’elle sert mensuellement aux pensionnés.

Cependant, le ministre Motazé précise que les fonds saisis des comptes de la CNPS, au titre de ce redressement fiscal, ne lui seront pas remboursés et sont désormais considérés comme des « crédits d’impôt », sur lesquels seront progressivement défalqués les impôts à payer par la CNPS au cours des mois et années à venir. Ceci dans la mesure où, même si cette entreprise publique « jouit, pour toutes ses activités liées aux prestations de sécurité sociale, d’un régime fiscal privilégié conformément à la législation en vigueur », elle reste « soumise au régime fiscal de droit commun » en ce qui concerne toutes ses « activités commerciales (placements financiers, location d’immeubles, etc., NDLR) », comme le stipulent les alinéas 1 et 2 du décret du 7 juin 2018 portant réorganisation et fonctionnement de cette société d’État.

Selon le fiscaliste Alain Ndzana Biloa, la victoire que vient de remporter la CNPS sur l’administration fiscale est simplement la conséquence d’un vide juridique. « C’est la stricte application du droit. Il y a effectivement un vide juridique. Le ministre ne remet pas en question le principe de l’imposition des pensions, mais s’appuie sur le fait que l’article 81 du Code général des impôts a oublié de mentionner expressément que c’est la CNPS qui doit collecter cet impôt et le reverser », souligne-t-il.

Révision du Code général des impôts

En effet, cet article, qui traite des modalités de perception de l’IRPP sur les salaires, pensions et rentes viagères, est muet sur les modalités de perception de l’IRPP sur pensions et rentes viagères. Il indique juste que l’IRPP sur les salaires « est retenu à la source par l’employeur lors de chaque paiement ». « Même si le Code ne désigne pas clairement le collecteur en ce qui concerne l’IRPP sur les pensions, il va de soi que c’est la CNPS qui devrait la collecter, en sa qualité d’organisme chargé de la gestion des pensions des retraités », soutient un cadre des impôts, dont l’argumentaire se heurte cependant à la nature « stricte » de la loi fiscale, qui ne donne droit à aucune interprétation et ne se fonde que sur ce qui est expressément écrit ou indiqué dans le Code. C’est d’ailleurs sur ce refus de soumettre la loi fiscale à toute interprétation que se fonde le ministre des Finances dans son courrier du 6 septembre 2023, pour annuler le redressement fiscal imposé à la CNPS par l’administration fiscale.

Mais, comme le précise le fiscaliste Alain Ndzana Biloa, la sortie du ministre des Finances ne remet pas en cause l’imposition des pensions retraite, qui est vivement contestée par certains syndicats des travailleurs.  Pour ces syndicats, à l’instar de l’Union générale des travailleurs du Cameroun (UGTC), l’imposition des pensions et rentes viagères, pourtant prescrite par le Code général des impôts, est en porte à faux avec l’article 40 de l’ordonnance du 22 mai 1973 portant organisation de la prévoyance sociale au Cameroun. Cette ordonnance qui stipule que « en raison des activités qu’elle exerce, la Caisse nationale de prévoyance sociale est exemptée de tous impôts et de tous droits de timbre et d’enregistrement ». « Cette disposition s’applique à la CNPS en tant qu’entreprise exonérée des impôts auxquels sont assujetties les entreprises ordinaires, et non aux prestations qu’offre cette société », nuance un agent des impôts. En effet, c’est la personne morale (CNPS) qui est concernée par l’ordonnance du 22 mai 1973 et non la personne physique (le pensionné) sur qui l’IRPP est appliquée.

C’est justement en raison de cette nuance, soutient-on à la DGI, que le Code général des impôts stipule, en son article 30, que « sont imposables, les revenus provenant des traitements publics et privés, des salaires, indemnités, émoluments, des pensions et rentes viagères, lorsque l’activité rétribuée s’exerce au Cameroun. Les pensions et rentes viagères sont réputées perçues au Cameroun lorsque le débiteur est établi au Cameroun ». C’est cette disposition, présente dans le corpus règlementaire du fisc camerounais depuis 1973 (voir article 68 du Code général de l’impôt de cette année), que l’administration fiscale souhaite désormais appliquer, dans un contexte d’élargissement de l’assiette fiscale, au regard des besoins financiers de plus en plus croissants du Trésor public.

Mais pour implémenter cette mesure d’imposition des pensions retraite, il faudra d’abord, selon nos sources, procéder à une révision du Code général des impôts, pour préciser l’acteur auquel incombe la collecte de l’IRPP sur les pensions retraite. Ce qui est généralement fait par la loi de finances. Il est de ce fait peu probable que cette modification intervienne avant l’adoption de la loi des finances 2024. Ce qui reporte de fait la collecte de l’IRPP sur les pensions retraite et les rentes viagères.

Brice R. Mbodiam

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