(Investir au Cameroun) - Le 11 juin 2021, le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative (Minfopra), Joseph Lé (photo), a signé 28 arrêtés portant ouverture de concours pour le recrutement de nouveaux personnels dans différents corps de la fonction publique, pour le compte de l’année 2021. Au total, seulement 1 536 postes sont ouverts. Ce chiffre révèle une baisse drastique, en comparaison avec les 3 700 places pourvues en 2020, contre respectivement 5 411 et 5 179 postes respectivement ouverts en 2019 et 2018.
« Cette décroissance trouve ses éléments d’explication dans la conjoncture socioéconomique particulièrement sévère, ravivée par les effets néfastes de la pandémie du coronavirus, notamment dans les secteurs productifs de notre économie. Ce qui impose au gouvernement des efforts particuliers d’ajustement », a justifié le ministre Lé.
Mais, bien au-delà d’une simple situation conjoncturelle, le gouvernement camerounais, à travers cette réduction progressive des recrutements à la fonction publique, tente de résoudre un problème structurel devenu nocif pour les finances publiques. En effet, confessent les officiels, l’évolution de la masse salariale de l’État du Cameroun ces dernières années fragilise de plus en plus l’équilibre budgétaire.
« L’analyse de l’évolution des dépenses de personnel au cours des 10 dernières années a permis de relever que la masse salariale effectivement payée aux agents publics dans le budget de l’État croit annuellement de 5,6% en moyenne, malgré les multiples actions d’assainissement du fichier solde de l’État (…) Cette progression a été déjà relevée dans l’étude réalisée en 2018 sur la soutenabilité de la masse salariale, qui avait établi, par ailleurs, que l’augmentation des effectifs est la principale source d’accroissement de la masse salariale. Cette augmentation résulte du niveau très élevé des recrutements au cours des dix dernières années, en comparaison avec les départs à la retraite », peut-on lire dans un document annexé à la loi de finances de l’État, pour l’exercice 2021.
Non-respect du ratio Cemac
En effet, révèle le même document, entre l’année 2011 et fin juin 2020, les effectifs de la fonction publique camerounaise ont pratiquement doublé, passant de 197 471 à 340 957 personnes. Les dépenses de personnel ont connu la même courbe ascendante, passant au cours de la même période, de seulement 681,4 milliards de FCFA à plus de 1000 milliards de FCFA. Cet accroissement est principalement le fait des recrutements massifs des personnels dans l’enseignement secondaire.
« En passant de 30 640 à 83 308 entre janvier 2010 et juin 2020, les effectifs des enseignants du secondaire se sont multipliés par 2,7. Ils représentent désormais 34,4% des effectifs de la fonction publique, alors qu’ils n’en représentaient que 15,8% au début de l’année 2010. De même, leur masse salariale représente 32,3% contre 21% en 2010 », apprend-on.
La réduction du volume des recrutements à la fonction publique observable sur la période 2018-2021, couplée au dernier comptage physique des personnels de l’État, qui a permis de déceler des agents fictifs émargeant au fichier solde de l’État ; le Cameroun pourrait enfin respecter le ratio de soutenabilité de la masse salariale fixé à un maximum de 35% dans le cadre des critères de surveillance multilatérale édictés par la Cemac.
En effet, au Cameroun, ce ratio, qui fait le rapport entre le volume des recettes fiscalo-douanières collectées au cours d’une année et les dépenses de personnel de l’État, a par exemple culminé à 36,5% en 2019. Pis, il s’agit de la meilleure performance réalisée par le pays au cours des 10 dernières années.
Brice R. Mbodiam
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