(Investir au Cameroun) - Après l’annonce par le Cameroun de « sa volonté de rétablir dès le 1er janvier 2021, le calendrier de démantèlement tarifaire contenu dans l’Accord de partenariat économique (APE) » avec l’Union européenne (UE), Bruxelles informe qu’elle va se « pencher prochainement » sur la demande de financement de la stratégie nationale de mise en œuvre de l’APE, conçue par Yaoundé.
En effet, le 24 juillet 2020, Alamine Ousmane Mey, le ministre de l’Économie, en charge de la conduite de l’APE avec l’UE, a soumis à la partie européenne et à ses États membres un document de plaidoyer relatif au financement de cette stratégie, qui contient les besoins prioritaires en termes de mesures d’accompagnement de l’APE. Chiffré à 607,63 millions d’euros (398,6 milliards de FCFA), le plan a pour objectif d’améliorer l’environnement des affaires et stimuler les investissements, de promouvoir un secteur privé dynamique et compétitif, d’augmenter les exportations du Cameroun et de favoriser l’intégration régionale, et enfin de conduire le monitoring de l’APE.
« L’objectif général de ces mesures d’accompagnement est de promouvoir un accroissement quantitatif et qualitatif des biens et services produits et exportés par le Cameroun, de sorte à pleinement profiter de l’accès illimité au marché européen, tel que garanti par l’APE », reconnait Hans-Peter Schadek, ancien chef de délégation de l’UE au Cameroun (2017-2020). À la veille de la programmation du prochain programme de coopération (2021-2027), le précédent s’achevant cette année, Alamine Ousmane Mey avoue qu’une réaction de l’UE sur cette question serait « très appréciée ».
Divergences
Mais jusqu’ici, Bruxelles a fait le mort. « Cette demande nous est parvenue en coïncidence avec la lettre du gouvernement qui nous informait de la suspension temporaire de la mise en œuvre de l’APE. Il était donc utile de clarifier en premier lieu la question de la reprise de l’application de l’accord », explique, ce 16 novembre 2020, Sébastien Bergeon, chargé d’affaires par intérim à délégation de l’UE au Cameroun, pour justifier ce silence. Il faut cependant dire qu’entre l’envoi du document de plaidoyer et la lettre de notification de la suspension de la mise en œuvre de l’APE, il s’est écoulé deux semaines. « Vu l’avancement sur ce sujet, nous allons pouvoir nous y pencher prochainement dans la continuité de notre partenariat constructif », assure aujourd’hui le diplomate européen sollicité par Investir au Cameroun.
Avec la compensation de l’impact fiscal net (IFN), les mesures d’accompagnement font partie du volet développement de l’APE (articles 10 et 12 de l’accord). Cette question a toujours fait l’objet de frictions entre le Cameroun et son partenaire européen. Yaoundé attend de Bruxelles un engagement similaire à celui pris en Afrique de l’Ouest. Dans cette partie du continent, l’UE s’est engagée à financer le premier plan opérationnel de 5 ans (2015-2020) du programme APE pour le développement, à hauteur de 6,5 milliards d’euros (près de 4 261 milliards de FCFA). Mais jusqu’ici, en ce qui concerne le Cameroun, l’UE n’est pas allée au-delà des ressources disponibles dans le cadre de la coopération au développement arrêtée avant la ratification de l’APE par ce pays de la Cemac.
Pour Yaoundé, le volet développement de l’APE n’est donc pas toujours mis en œuvre. Dans sa correspondance du 10 novembre 2020, adressée au chef de la délégation de l’UE à Yaoundé et annonçant la reprise du démantèlement tarifaire suspendu le 4 août 2020, le ministre camerounais de l’Économie sollicite « sans délai l’accompagnement de l’Union européenne dans la mise en œuvre » de ce volet de l’accord.
Aboudi Ottou
Lire aussi :
11-11-2020-APE : malgré les protestations de l’UE, le Cameroun maintient la suspension du démantèlement tarifaire jusqu’à fin 2020