(Investir au Cameroun) - Dans une correspondance datée du 5 juin 2020 et signée du ministre des Finances (Minfi), Louis Paul Motaze, l’on apprend que le Cameroun a autorisé l’importation, en franchise de droits de douane, 200 000 tonnes de riz pour constituer un « stock de sécurité » afin de couvrir les besoins du marché national pour le reste de l’année 2020.
Les 200 000 tonnes de riz à importer ont été réparties entre différents importateurs. On sait par exemple que la société Sonam, premier importateur de riz en 2019 avec 226 816 tonnes, devra importer 70 000 tonnes.
Après avoir totalement exonéré le riz de droits de douane en 2008, le Cameroun les a partiellement rétablis depuis 2016. Un taux Tarif extérieur commun (Tec) de 5%, contre un taux de 20% normalement prévu, est appliqué aux importations de riz. À en croire la lettre du Minfi, ces 200 tonnes de riz ne paieront pas ce Tec. « Je vous engage à répercuter la dépense fiscale induite sur le prix de vente desdites denrées », écrit Louis Paul Motaze dans un courrier adressé au directeur général de Sonam.
À rebours du discours
Cette décision a surpris plus d’un. Car elle intervient dans un contexte où le gouvernement affirme vouloir implémenter une nouvelle stratégie pour booster la production locale. « Au regard de la baisse des recettes publiques, les perspectives économiques et financières de l’État pour la période 2021-2023 s’articulent principalement autour de la politique de “l’import-substitution” à travers la réduction ou la suppression progressive des exonérations sur certains produits qui grèvent la balance commerciale, de manière à favoriser leur production locale à plus grande échelle », explique le Minfi, au cours d’un conseil de cabinet spécial tenu le 2 juillet dernier.
Concrètement, le Cameroun prévoit, selon le Document d’orientation budgétaire (DOB), de faire passer le taux du Tec de 5% à 10% en 2021. Il propose par ailleurs de plafonner les financements bancaires afférents aux importations et de limiter les volumes des produits importés. Le gouvernement annonce également des dispositions particulières pour les filières légumineuses et féculents dont la production est susceptible de compenser le gap de la demande inhérent à la réduction des importations.
En 2019, renseigne le DOB, le Cameroun a importé 905 107 tonnes de riz pour une dépense fiscale de 79,1 milliards de FCFA. En matière de dépenses fiscales, l’exonération de TVA et des droits de douane sur le riz est la mesure la plus couteuse. Elle a représenté 3,5% de recettes fiscales en 2018.
Sylvain Andzongo et Aboudi Ottou
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