(Investir au Cameroun) - Le charges colossales, l’endettement abyssal, le manque d’innovation et de compétitivité… ne semblent pas être les seules raisons pouvant expliquer les piètres performances financières de la majorité des entreprises publiques au Cameroun. Dans un document annexé à la loi de Finances 2021, le gouvernement met également à l’index le fait pour l’Etat de sous-traiter des missions dites « de service public » à certaines entreprises de son portefeuille.
« Dans le cadre de leur exploitation, certaines entreprises publiques sont dans l’obligation de prendre en charge le coût des missions de service public. Toutes ces opérations, qui devraient être inscrites dans le budget d’investissement public (BIP), grèvent les marges desdites entreprises », souligne le document sus-mentionné.
Parmi les sociétés d’Etat qui font face à cette contrainte, le gouvernement cite nommément la Société de développement du coton (Sodecoton) ; Pamol Plantations, qui exploite le palmier à huile ; la CDC, 2ème employeur du pays après l’administration publique, qui exploite l’hévéa, le palmier à huile et la banane ; la Société d’expansion et de modernisation de la riziculture de Yagoua (Semry) ; et la Upper Nun Valley Development Authority (UNVDA).
En effet, dans le cadre de leurs activités, ces entreprises à capitaux publics ou mixtes réalisent des missions de service public telles que, souligne le document sus-mentionné, les travaux d’entretien routier visant à faciliter la collecte de la production ; la construction et la prise en charge du fonctionnement des écoles, des dispensaires et des centres de santé ; l’encadrement et la formation des chercheurs et des paysans ; la mise à disposition des logements au profit de certaines autorités ; la prise en charge des forces de sécurité, etc.
L’exemple de la Sodecoton
Pour mieux comprendre l’impact de ces activités de service public sur la trésorerie et plus globalement les performances financières des entreprises publiques, une société comme la Sodecoton revendique, par exemple, l’ouverture de 26 000 Km de route depuis sa création en mai 1974. De même, apprend-on de sources internes à cette société à capitaux mixtes, ce mastodonte de l’agro-alimentaire des régions septentrionales du Cameroun entretient, chaque année, environ 7000 km de routes rurales.
La Sodecoton, qui a obtenu de l’Etat-actionnaire de souvent se faire rembourser les dépenses relatives à ces travaux, mais qui peine généralement à les recouvrer, est en réalité obligée de réaliser ces travaux, en raison de la « sous-budgétisation » de l’entretien des routes rurales au Cameroun. « L’enveloppe budgétaire allouée à l’entretien des routes rurales et des pistes de collecte s’élève à environ 10 milliards de FCfa, pour un réseau dont l’inventaire des routes qui le constituent révèle un linéaire de plus de 100 000 km », avait révélé Patrice Amba Salla devant les députés en juin 2015, alors qu’il était ministre des Travaux publics.
Selon les calculs de ce membre du gouvernement camerounais de l’époque, cette dotation budgétaire correspondait à une affectation de 60 000 FCfa par kilomètre de route à entretenir, dans un pays où le prix de revient de l’entretien d’un kilomètre de route en terre est estimé à 2 millions de FCfa.
Brice R. Mbodiam