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Yaoundé - 29 mars 2024 -
Gestion publique

Agriculture, TIC, culture, sport, PME… : les nouveaux chantiers de la bataille économique de la France au Cameroun

Agriculture, TIC, culture, sport, PME… : les nouveaux chantiers de la bataille économique de la France au Cameroun

(Investir au Cameroun) - Le 26 juillet 2022, au cours de la conférence de presse qui a ponctué sa visite officielle de deux jours au Cameroun, Emmanuel Macron, le chef de l’État français, est revenu sur les raisons de la perte de l’influence française sur le terrain économique au Cameroun. Il a ensuite décliné la feuille de route qu’il souhaite dérouler au cours de son nouveau mandat à la tête de la France, pour doper la coopération économique entre les deux pays, désormais en proie à ce qu’il qualifie de « concurrence accrue ».

« L’AFD (Agence française de développement) n’a pas cessé son engagement (2 milliards d’euros, soit plus de 1 300 milliards de FCFA de financements au Cameroun au cours des 10 dernières années, NDLR). Le Cameroun est l’un des pays dans lesquels nous sommes les plus exposés et avons plus d’ambitions. Simplement, et c’est très légitime, ce pays s’est formidablement développé, a gagné en population et s’est ouvert. Et donc, d’autres pays, d’autres entreprises… sont venus sur le théâtre pour proposer. (…) Nous avons été moins bons que les autres et nous n’avons pas obtenu les contrats », a confessé le chef de l’État français.

 Afin de redorer le blason économique de la France au Cameroun, pays dans lequel l’on dénombre environ 200 entreprises françaises, Emmanuel Macron souhaite que son pays aille « au-delà » de ses investissements traditionnels tels que « les grandes infrastructures et les commodités (néologisme par francisation de l’anglais qui désigne les produits de base, NDLR) ». En clair, le chef de l’État français parie désormais sur la diversification de l’offre d’investissement, avec une certaine emphase sur des secteurs bien précis.

Corruption, opacité…

« Nous sommes présents sur l’agriculture. Mais, je souhaite qu’on fasse plus, parce que c’est l’un des enjeux clés. Qu’on soit plus présents sur les industries culturelles et créatives, le sport, le numérique, l’entreprenariat… Je pense qu’il y a un énorme défi au Cameroun, comme partout en Afrique, qui est de réussir à sortir une grande partie de l’économie, qui reste, si je puis dire, entre les mains des femmes, de l’informel pour lui permettre de rentrer dans l’économie formelle. Pour cela, il faut avoir des partenariats avec des PME, savoir structurer des financements… Voilà quelques-uns des sujets sur lesquels je souhaite qu’on puisse réinvestir la relation pour lui donner un nouveau tour, pas simplement quantitatif, mais aussi qualitatif et de confiance », a confié Emmanuel Macron lors de sa première visite en terre camerounaise.

Au demeurant, a laissé entendre le président français, la nouvelle offensive économique qu’entend lancer la France au Cameroun ne saurait être efficace et porteuse dans un environnement gangréné par la corruption et l’opacité dans l’attribution des contrats. Aussi, Emmanuel Macron a-t-il invité les deux pays à œuvrer « ensemble aux bonnes réformes de gouvernance, pour que tous ces contrats soient faits dans la transparence, et qu’on ait une lutte efficace contre la corruption ». « C’est bon la concurrence, mais elle est moins bonne quand ce n’est pas la qualité de l’offre qui gagne et qu’il y a des choses qui se passent à côté. On a tous connu ça », a dénoncé le chef de l’État français.

Pour rappel, selon les données officielles, au cours des 30 dernières années, les entreprises françaises ont perdu 30% des parts de marché au Cameroun. « La part de marché des entreprises françaises au Cameroun est passée de 40% dans les années 1990 à 10% aujourd’hui », a révélé Christophe Guilhou, l’ambassadeur de France au Cameroun. C’était le 24 juin 2021 devant les étudiants de l’Institut des relations internationales du Cameroun (Iric), au cours du « Forum diplomatique », le concept de grandes conférences de cette grande école camerounaise.

Battue par la Chine

De l’avis de nombreux observateurs du landernau économique national, ce recul des entreprises françaises sur le marché camerounais s’explique par l’offensive chinoise. « Entre 2000 et 2014, le Cameroun a capté 2750 milliards de FCFA d’investissements directs étrangers (IDE), dont 1850 milliards de FCFA provenant de la Chine. Ce qui représente environ 67% des IDE entrant au Cameroun (…) Les autres IDE provenaient des pays tels que la France, les États-Unis, le Nigéria », peut-on lire dans un document de la présidence de la République du Cameroun, qui cite les données de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced).  

En effet, depuis le début des années 2000, l’Empire du Milieu rafle pratiquement tous les contrats d’infrastructures au Cameroun. Cette prédominance s’est décuplée à partir de l’année 2012, à la faveur du lancement des projets structurants de première génération (ponts, routes, barrages, etc.). Tractées par Eximbank China, la banque publique chinoise, dont les financements sont liés (chaque prêt-projet est accompagné du nom de l’entreprise devant exécuter le contrat), les entreprises chinoises sont toujours en pole position. Il s’agit principalement de CCCC, CWE, CHEC, Sinohydro… dans les infrastructures ; Huawei et ZTE dans les télécoms…

Au plan commercial, la situation n’est guère plus reluisante pour les partenaires français. Avec 21,5% des parts de marché, la Chine demeure le principal client à l’export du Cameroun en 2020, selon les données compilées par l’Institut national de la statistique (INS). Mieux, au cours de l’année sous revue, l’Empire du Milieu, qui occupe cette place depuis 2013, renforce son statut en gagnant trois points de pourcentage par rapport à l’année 2019. À l’import, à en croire la même source, la Chine a capté 17,5% des dépenses d’importations du Cameroun en 2020, soit deux fois plus que la France (8,7%), trois fois plus que la Belgique (5,6%) et l’Inde (5%) et quatre fois plus que les États-Unis (4,4%).

Brice R. Mbodiam

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