(Investir au Cameroun) - Invité par son homologue français, Emmanuel Macron, à participer au Forum de Paris sur la paix du 11 au 13 novembre, le chef de l’État camerounais Paul Biya a pris part comme panéliste à un débat modéré par Mo Ibrahim, sur le thème : « Reconnaître le Sud : pour une gouvernance mondiale plus équilibrée ».
« Mon pays est compliqué. Nous avons été d’abord une colonie allemande. Après la Première Guerre mondiale, l’Allemagne a perdu ses colonies ; celles-ci ont été partagées entre la Grande-Bretagne et la France. Et mon pays a été divisé. Une partie était sous colonisation britannique et l’autre sous colonisation française. Il en est résulté une juxtaposition de culture et de civilisation qui rendent les choses assez délicates. Bon, on a tout fait pour mettre à égalité les deux langues, les langues anglaise et française. Mais, les mentalités, les systèmes scolaires, le système de la magistrature sont différents. Nous avons donc eu des conflits qu’on est en train de résoudre en ce moment, pour conserver à la partie de mon pays qui était sous colonisation britannique, un statut spécifique », a expliqué Paul Biya.
Le président camerounais a ajouté : « On avait la possibilité de les [anglophones] intégrer directement dans le système francophone qui était celui de la majorité du peuple : 80%. Mais, je crois que les pays sont soucieux aujourd’hui d’affirmer leur identité et c’est pour ça que nous mettons sur pied un statut spécial qui reconnaît la spécificité de la zone anglophone, mais, elle reste dans l’intégrité territoriale du Cameroun ».
Depuis octobre 2016, les zones anglophones du Nord-Ouest et le Sud-Ouest du Cameroun connaissent une crise sociopolitique violente, sous fond de séparatisme. L’Union européenne (UE) note que la crise humanitaire s’en trouve aggravée, poussant davantage de personnes à l’exil. On compte aujourd’hui près de 42 000 réfugiés au Nigeria et 530 000 déplacés internes. Pour sa part, l’ONG International Crisis dénombrait près de 2000 morts après 20 mois de combats entre des extrémistes indépendantistes et les forces de défense.
Malgré l’organisation d’un dialogue national sur la crise anglophone tenu du 30 septembre au 4 octobre 2019 à Yaoundé, l’UE se dit préoccupée et condamne avec vigueur la persistance de la violence et le niveau d’insécurité dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun, notamment à l’encontre des populations civiles. « De nombreuses et graves violations des droits de l’homme continuent d’être rapportées et une criminalité prédatrice s’est développée », décrie le Conseil de l’Union européenne.
Sylvain Andzongo