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Yaoundé - 23 avril 2024 -
Portraits

Debora Claire Kingsley, se loger sans tracas…

Debora Claire Kingsley, se loger sans tracas…

(Investir au Cameroun) - Au son de sa voix calme, hésitante et faussement timide, le réflexe des préjugés fait tout de suite penser à une jeune fille peu sûre d’elle, peu raffinée et au look de hipster. Pourtant, l’imposante berline aux vitres fumées qu’elle conduit et le pas lent d’où se dégage une certaine assurance suggèrent que la trentenaire n’est pas du genre à se laisser conter.

« J’aurais dû venir vers toi si je savais que tu mettrais autant long. Je joue sur le temps, mes journées sont très longues », nous fait-elle poliment savoir en nous rejoignant dans le bistrot où nous avions rendez-vous. Debora Claire Kingsley a en effet un agenda chargé. Ancienne banquière, elle a tout lâché pour monter sa start-up : Nimmo-auto, un écosystème phygital, composé d’une application et d’un site internet, d’une part, et, d’autre part, de représentations physiques à travers le pays (pour l’instant à Yaoundé et Douala).

Via ces deux supports, la startup offre des prestations dans l’immobilier (location, vente des maisons ou des terrains) et l’automobile (vente et achat) au Cameroun. En quelques secondes, l’usager peut s’y inscrire gratuitement et spécifier son besoin. Il peut aussi indiquer la fourche de prix qui lui est accessible, la ville où il réside afin d’accéder à des offres disponibles s’il est client, ou alors placer son bien s’il est un offreur. Une fois le besoin spécifié, le client est saisi par un agent de Nimmo-auto qui va effectuer la mise en relation avec le vendeur ou alors accompagner le client dans l’acquisition de son bien si ce dernier n’a pas assez de temps.

Il existe des agences plus structurées, cependant, elles exigent des commissions jugées onéreuses par une clientèle qui préfère se tourner vers les agents indépendants, malgré le risque de se faire duper, ces indépendants évoluant dans l’informel. Nimmo-auto se positionne donc comme une alternative. « À première vue, nous sommes une agence immobilière qui opère juste via le digital. Mais l’accompagnement et l’expérience client que nous apportons vous font voir en quoi nous nous distinguons », souligne Debora Claire Kingsley pour se distinguer de la concurrence. Sur chaque opération, la jeune entreprise a une commission qui est prélevée à la fois chez le client et chez le vendeur. « Mais elles sont très faibles par rapport à ce qu’exigent les opérateurs classiques », précise l’entrepreneuse.

Découverte de l’immobilier...

En 2014, alors qu’elle n’a que deux ans de fonction à la Banque internationale du Cameroun pour l'épargne et le crédit (Bicec), Debora Claire Kingsley fait la rencontre d’un agent immobilier spécialisé dans la vente des terrains. Elle est son gestionnaire de compte. Il lui propose de commercialiser des terrains pour son compte. « Quelques jours après m’avoir accosté, il a été surpris par la rapidité avec laquelle j’ai eu à liquider les parcelles qu’il m’avait confiées. C’est ainsi que notre collaboration a commencé », se souvient-elle. Impressionné par l’habileté de cette dernière, il lui confie d’autres parcelles. La banquière y prend goût, motivée par les commissions qui lui sont reversées après chaque vente. 

Mais la décision d’y faire carrière ne tient pas juste au côté lucratif de l’activité. Alors qu’elle vend des terrains pour son nouveau partenaire, elle observe le marché de la location immobilière. Et elle est agacée par la peine que ses proches ont à trouver un logement. Ces derniers font face à des agents immobiliers véreux qui les arnaquent parfois ou ne donnent pas satisfaction.

Démission de la Bicec

Malgré les encouragements de son partenaire d’affaires, elle résiste à l’idée d’abandonner cette carrière de banquière dont elle rêve depuis son enfance. Une enfance qui débute à Edéa, la ville qui l’a vue naître le 26 mars 1992 dans une fratrie de trois enfants. Avec sa grande sœur Marie Geneviève Ngo Ntamack et son petit frère Jacques Noël Ikoula, elle grandit dans une famille modeste. Leur père, professeur de lycée, et leur mère, ménagère, placent Dieu et la discipline au centre de l’éducation de leurs enfants.

Un pari gagnant au regard du parcours scolaire Debora Claire Kingsley, sanctionné par un master II en banque et finances obtenu à l’école supérieure Supdeco et d’un autre master en marketing international décroché à l’Institut des relations internationales à Yaoundé. Du haut de ce curriculum, Debora Claire Kingsley entame une carrière dans la banque en 2012. « Au départ j’étais très enthousiaste, je réalisais un rêve, mais au fil des années j’ai commencé à moins m’épanouir dans ce cadre truffé de procédures… Je ressentais en moi le besoin d’apporter un peu plus que ce que je faisais jusque-là », fait-elle savoir.  

Dans un coin de sa tête, son projet immobilier germe et après une étude de marché en 2017, tout est clair pour elle.  « Entre manque de professionnalisme des agents immobiliers et insatisfaction des clients, j’ai décelé des failles et je savais ce qu’il y’avait à faire pour faciliter la recherche d’un logement aux Camerounais », indique-t-elle.

Elle démissionne alors de la Bicec en novembre 2018, puis crée Nimmo-auto qui coopère aujourd’hui avec 273 propriétaires immobiliers et 103 vendeurs de véhicules sur toute l’étendue du territoire.

Difficultés...

Mais dans un pays où 92% des jeunes évoluent dans le secteur informel, selon le Plan d’action national pour l’emploi des jeunes (Panej) 2016-2020, les parents de la jeune dame ne comprennent pas son choix. « Je viens d'une famille où le chef est fonctionnaire, il a donc été difficile pour mes parents d'admettre qu'il soit possible de s'en sortir autrement que dans un cadre salarial... mais, ils ont fini par partager ma vision », raconte-t-elle. Heureusement, son époux, avec qui elle a une vie commune depuis ses 20 ans, est un soutien de la première heure. Kingsley partage l’ambition de son épouse de réduire les procédures et de sécuriser les opérations d’acquisition ou de vente immobilières et automobiles.

Les autres difficultés sont inhérentes au parcours de tous les entrepreneurs… « En 2019, nous avons mis en place la plateforme puis l'application numérique et l'équipe Nimmo-auto s'est formée. A certains moments, j'ai eu quelques doutes du fait que j'étais si certaine d'avoir tout calculé et tout évalué. Malheureusement, il y a des aléas à la réalisation de tout projet. J'ai dû persévérer même si je me suis demandé si ça en valait réellement le coup », révèle l’entrepreneure.

Ambitions et perspectives  

Aujourd’hui, la jeune pousse emploie directement et indirectement une cinquantaine de jeunes camerounais. Le siège de son entreprise est situé à Yaoundé au quartier Bastos. Elle dispose d’une représentation à Douala au quartier Bali et des représentants dans plusieurs villes du pays.

Au moment où elle s’apprête à lancer une campagne de communication de masse autour de sa solution, Debora Claire Kingsley se dit heureuse du chemin parcouru. « Nous sommes en train de faciliter et de sécuriser les opérations immobilières au Cameroun. Nous restons dans un processus continu d’amélioration de service, le but étant de supprimer les procédures liées à l’acquisition ou la vente d’un bien ». Il faut dire qu’au Cameroun, il est très fréquent de voir des opérations d’achat d’un terrain déboucher sur des litiges fonciers. Pour instruire davantage l’opinion sur les risques autour de telles opérations, la startup anime un blog sur des thématiques autour de l’achat et la vente d’un bien immobilier ou automobile.

Tous les matins, lorsqu’elle quitte son domicile situé au quartier Ahala pour vaquer à ses occupations, à bord de son véhicule, elle entame ses journées en écoutant I need you, un titre de Donnie McClurkin Jr, pasteur et chanteur de gospel américain. Une manière pour elle de louer Dieu et de lui demander la force d’aller plus loin.

Aller plus loin, pour elle, signifie apporter une contribution à la résorption du déficit de logement évalué à 2,5 millions unités en milieu urbain au Cameroun. Pour y parvenir, elle veut élargir ses activités au BTP afin de réaliser des travaux de construction pour des clients. Par la suite, elle souhaite se lancer dans la construction de son propre patrimoine immobilier. « C’est ambitieux de penser comme ça lorsqu’on est une femme dans notre contexte. Mais j’y parviendrai », se convainc-t-elle.

Nselel Jean Christian

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