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Yaoundé - 25 avril 2024 -
Télécom

Soupçons de tripatouillages autour de l’attribution des licences télécoms aux opérateurs Orange, Nexttel et MTN Cameroun

Soupçons de tripatouillages autour de l’attribution des licences télécoms aux opérateurs Orange, Nexttel et MTN Cameroun

(Investir au Cameroun) - Y a-t-il à redire sur le processus ayant conduit à l’attribution de la première licence 3G du Cameroun à l’opérateur de téléphonie mobile Nexttel, en 2012, et au renouvellement des licences de MTN et Orange Cameroun, en mars 2015 ?

A la lecture de la correspondance signée, le 10 décembre 2018, par le secrétaire général de la présidence de la République (SGPR), Ferdinand Ngoh Ngoh, qui répercute à certains services les instructions du chef de l’Etat, prescrivant un audit de ces trois concessions, l’on est fondé à répondre à cette interrogation par l’affirmative.

Au demeurant, quels détails des négociations entre le gouvernement et les opérateurs télécoms concernés peut bien contenir la « note d’information parvenue à la présidence de la République », laquelle, selon le SGPR, a déclenché l’instruction présidentielle d’auditer les concessions faites à MTN, Orange et Nexttel ? Pour esquisser une réponse, il faut remonter à l’année 2012.

Cette année, en effet, au terme d’un appel d’offres pour l’attribution d’une 3ème licence de mobile au Cameroun, le gouvernement jette son dévolu sur le groupe vietnamien Viettel, qui lancera finalement ses activités avec 2 ans de retard, en septembre 2014, sous la marque Nexttel. Pour ce faire, l’opérateur payera un ticket d’entrée de 20 milliards FCFA, qui lui donne l’opportunité de déployer le tout premier réseau 3G sur le territoire camerounais.

En 2014, forts de l'expiration, en début d’année 2015, de leurs licences 2G, Orange et MTN initient chacun le processus de renouvellement de leurs licences auprès de l’Agence de régulation des télécoms (ART).

De sources proches du dossier, l’ART élabore alors pour chacun des opérateurs un cahier des charges pour l’attribution des licences 2 et 3G, assorti d’une proposition financière adressée au gouvernement. Sur la base de la licence 3G déjà attribuée à 20 milliards  FCFA en 2012, apprend-on, l’ART suggère que le même montant soit reconduit pour MTN et Orange.

Les propositions du régulateur ignorées lors des négociations

Une analyse du marché révélant le leadership incontesté de l’opérateur sud-africain au Cameroun permettra au régulateur d’ajouter aux enveloppes susmentionnées, respectivement 46 et 48 milliards FCFA pour Orange et MTN.

En gros, pour le régulateur, le gouvernement devra renouveler les deux licences avec 3G, à 66 milliards pour Orange et 68 milliards pour MTN.

Le dossier est transmis au gouvernement qui, apprend-on, décide de faire fi des propositions du régulateur, et engage lui-même sa propre étude, avec le concours d’un cabinet privé.

A l’ouverture des négociations, survient un premier coup de théâtre : l’une des parties met sur la table, comme préalable aux discussions sur le renouvellement des licences, la renégociation de la dette de 30 milliards FCFA, réclamée à MTN et Orange par l’Etat.

Selon nos sources, la partie gouvernementale accède à la requête d’annulation d’une partie de cette dette.

Bien que le montant effacé ne soit pas révélé par nos sources, l’on se souvient qu’un rapport de la Commission nationale anti-corruption (CONAC), publié le 19 janvier 2016, dénonçait un « cadeau fiscal illégal » octroyé à MTN et Orange par le gouvernement. Dénonciation après laquelle les deux opérateurs de mobile préciseront que « ce cadeau fiscal » jugé illégal par la CONAC est consécutif à un abattement de 60% sur les redevances dues au régulateur, au titre de la taxe sur les fréquences de transmission, pour la période allant de 2002 à 2014.

Le 2ème coup de théâtre est l’irruption de la requête des opérateurs, en vue de l’attribution de licences autorisant à la fois le déploiement de la 3 et la 4G.

« Cette requête survient au moment où les paramètres techniques pour le déploiement de la 4G n’existent même pas. Puisque ce n’est qu’en octobre 2015, c’est-à-dire sept mois après les négociations, que seront attribuées au Cameroun les fréquences 700 et 800 MHz » permettant de déployer la 4G, explique une source autorisée.

Doutes sur la préservation des intérêts de l’Etat

Après d’âpres négociations avec les opérateurs MTN et Orange, qui proposeront respectivement 35 et 40 milliards FCFA pour leurs nouvelles licences, la partie gouvernementale finit par obtenir une enveloppe de 75 milliards pour chacun des opérateurs, soit 150 milliards au total.

« L’ART avait proposé 66 et 68 milliards (134 milliards) pour chacun des opérateurs, pour la 2G et la 3G. Lors des négociations, il a été décidé de prendre 75 milliards chez chaque opérateur, non seulement en adjoignant la 4G à la licence, mais aussi en effaçant une bonne partie de la dette réclamée à MTN et Orange par l’Etat », fait remarquer une source proche du dossier.

Malgré la signature, en mars 2015, des contrats de concessions intégrant la 4G (sans cahiers des charges soumis aux opérateurs), le chef de l’Etat s’abstiendra de signer les deux licences jusqu’à ce jour. Ceci, en dépit de la signature, en avril et mai 2018, des avenants aux concessions attribuées 3 ans plus tôt aux deux opérateurs, après élaboration des cahiers des charges relatifs à l’exploitation du réseau 4G.

Selon le gouvernement, ces avenants avaient été prescrits par le chef de l’Etat qui souhaitait ainsi s’assurer que « les intérêts de l’Etat » ont été « préservés » au cours des négociations, selon les termes d’un communiqué officiel publié à cette occasion.

Mais, à la lecture de la lettre du SGPR du 10 décembre 2018, qui prescrit l’audit des différentes concessions faites aux opérateurs de mobile, même la signature des avenants de 2018 semble n’avoir pas emporté la conviction du président de la République, sur la protection absolue des intérêts de l’Etat lors des négociations.

Brice R. Mbodiam

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