(Investir au Cameroun) - Le ministre de l’Élevage, des Pêches et des Industries animales (Minepia), Dr Taïga, a signé, le 22 décembre 2023, un arrêté pourtant création, organisation et fonctionnement du Centre de valorisation de pêche artisanale de Youpwe (Cevapa-Youpwe). Ce centre, précise le texte ministériel, couvre l’ensemble des points de débarquement de la pêche artisanale du département du Wouri (Douala), parmi lesquels le débarcadère de Youpwe, construit grâce à un financement du Japon.
Cette décision du Minepia s’appuie notamment sur le décret du Premier ministre du 17 janvier 2002, fixant les normes de conditionnement et de transport des produits de la pêche. D’ailleurs d’après l’arrêté, le Cevapa-Youpwe est chargé d’accompagner le développement de la pêche artisanale en améliorant la qualité et la disponibilité des produits halieutiques, la promotion des activités de la chaine de valeur et du travail descend des acteurs et la réduction des pertes postcaptures. À ce titre, la nouvelle structure assure la formation et l’information des pécheurs sur la mer, l’entretien des installations et des équipements et l’avitaillement. Le 27 février 2024, Dr Taïga a nommé le directeur du Cevapa-Youpwe en la personne de Mbangsi Misper Anghoma.
La décision de création du Cevapa-Youpwe est contestée par la Communauté urbaine de Douala (CUD). Selon l’arrêté ministériel, la CUD a pourtant droit à un représentant au sein du comité gestion du centre, un organe notamment chargé de définir les modalités d’utilisation des infrastructures et des équipements, de recouvrement des droits d’usage et d’affectation des ressources. Elle est également consultée pour la nomination pour le directeur adjoint. Mais, son chef de division des affaires juridiques et du contentieux, Moukete Ekoume, qui dit agir au nom du maire de la ville, Roger Mbassa, a adressé, le 28 février 2024, au Minepia un recours gracieux préalable aux fins de rétractation de son arrêté. En clair, la CUD juge l’arrêté du Dr Taïga illégal et l’appelle à le retirer.
Pour justifier cette position, Moukete Ekoume, convoque la convention passée entre l’État du Cameroun, le Japon et la CUD. Elle dispose « expressément qu’après réception du débarcadère et du marché de poisson de Youpwe, celui-ci devrait être transféré à la CUD ». En effet, Moukete Ekoume rappelle que le procès-verbal des discussions sur l’étude préparatoire pour le projet d’amélioration du débarcadère et du marché du poisson précise que la CUD doit créer un comité de gestion. « Mais contre toute attente, vous avez pris l’arrêté susvisé et créé un centre de valorisation de pêche dans le Wouri incluant le site de Youpwe », dénonce ce dernier.
Un préjudice de plusieurs dizaines de millions de FCFA
En plus, le chef de division des affaires juridiques et du contentieux de la CUD accuse le Minepia d’excès de pouvoir et convoque l’article 156 du Code général des collectivités territoriales décentralisées qui dispose que « la construction, l’équipement, l’entretien et la gestion des marchés, gares routières et abattoirs… sont transférés aux communes ».
Ainsi, en prenant cet arrêté sans égard pour ces différents aspects, « vous avez causé un énorme préjudice à la CUD qui sollicite gracieusement sa rétractation pour éviter un éventuel contentieux en indemnisation devant le tribunal administratif », menace le cadre de la mairie de Douala. En effet, apprend-on du recours gracieux, sur la base de la convention tripartite (État du Cameroun-Etat du Japon-CUD), la mairie de Douala a consenti des dépenses financières. Le document cite les charges de l’électricité (toujours payée jusqu’à date), les frais de terrassement, les loyers de la base logistique (30 millions de FCFA hors taxe pour les années 2027 et 2018 et 12 millions de FCFA hors taxe par an à compter du 1er janvier 2019).
Achevé depuis le 15 décembre 2022, le débarcadère de Youpwé a été construit à hauteur de 6,6 milliards de FCFA. Il est un don du Japon dont la convention a été signée en 2017. Sa mise en service, toujours attendue, devrait permettre aux 262 vendeurs de poissons qui opéraient sur l’ancien site d’accroître leur production, de moderniser le système de commercialisation et les conditions sanitaires des produits halieutiques.
Frédéric Nonos
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