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Yaoundé - 30 avril 2024 -
Finance

Marché des capitaux de la Cemac : le banquier Pierre Kammogne alerte sur les revers de la boulimie des États

Marché des capitaux de la Cemac : le banquier Pierre Kammogne alerte sur les revers de la boulimie des États

(Investir au Cameroun) - Au 31 décembre 2023, l’endettement obligataire des États sur les marchés des capitaux de la Cemac représente plus de 50% des dépôts bancaires. Pour le directeur général d’Afriland Bourse & Investment, cela est le signe que les États accaparent tous les financements au détriment d’autres acteurs économiques. Ce qui, soutient-il dans cet entretien, est contreproductif pour les économies de la sous-région.

Investir au Cameroun : Lors de la présentation aux investisseurs du plan de financement du Cameroun pour l’année 2024, vous avez laissé entendre que les États ponctionnent l’épargne sur le marché de la Cemac et ne laissent presque rien aux autres acteurs. Quels sont les éléments qui vous permettent de l’affirmer ?

Pierre Kammogne : Au 31 décembre 2023, les États de la Cemac ont un endettement obligataire sur les marchés de la Cemac de 7 376 milliards FCFA (1 812 milliards FCFA pour le Cameroun), soit 10,5% du PIB de la Cemac. Ceci exclut les crédits directs auprès des banques. Cet endettement obligataire des États représente plus de 50% des dépôts bancaires. Si justement le taux de souscription est passé de 201% en juin 2018 à 70% en décembre 2023, le coût moyen net d’impôts et taxes dudit endettement est passé de 4,72% en juin 2018 à 7,65% en décembre 2023. Vous comprenez que l’argent est rare et trop cher pour les emprunteurs de moindre risque que sont nos États, combien de fois pour les entreprises et les ménages, même s’il faut relativiser en disant que cet argent est injecté dans l’économie, mais le citoyen ordinaire ne voit pas l’argent dehors, il est parti où ?

IC : Que demandez-vous concrètement ?

PK : Nos États ne doivent pas contribuer à l’inflation déjà assez haute pour les citoyens en tirant l’épargne aux taux de rendement exorbitants, sinon les crédits bancaires seront trop chers et indisponibles pour les entreprises et les ménages et les coûts de collecte des dépôts bancaires vont s’aggraver. Ce comportement de nos États, supposés être des références de risques dans une économie, donne à questionner sur la bonne gestion de nos finances publiques. Sous d’autres cieux, les taux des bons et obligations du Trésor sont inférieurs aux taux de refinancements des banques, aux taux de crédits aux entreprises et même aux taux de rémunération des dépôts bancaires.

IC : Où l’État doit-il aller rechercher des financements ?

PK : Pour chercher les financements, il faut être un bon gestionnaire et inspirer confiance. Si ces préalables sont là, la base d’investisseurs peut être élargie sur l’extérieur d’une part et d’autre part, si l’État contribue à la valeur ajoutée pour les autres agents économiques, il élargira ses recettes.

IC : Mais le problème ne vient-il pas des entreprises qui parfois ne remplissent pas les critères exigés pour bénéficier des fonds sur le marché ?

PK : Les critères pour avoir les financements sont généralement au nombre de quatre : avoir des moyens humains, matériels, techniques et être de bonne moralité ; avoir un marché actuel et futur ; avoir des perspectives de génération de l’argent solides et dans une moindre mesure avoir des garanties. Le problème pas n’est pas les critères d’accès au financement, puisque nous sommes dans une situation où vous remplissez ces critères et les banquiers ne vous donnent pas l’argent parce que l’État qui est moins risqué que vous les rémunère mieux.

IC : Quelles sont les conséquences si les entreprises ne parviennent pas à mobiliser les fonds sur le marché ?

PK : Elles ne vont pas produire et on continuera d’importer les biens pour nos besoins de base. Ce qui n’est pas bien pour notre stabilité monétaire ni pour notre indépendance économique.

Propos recueillis par Sandrine Gaingne

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