(Investir au Cameroun) - En ce début d’année 2022, les taux de souscriptions aux opérations de levées de fonds effectuées par le Trésor public camerounais sur le marché des titres publics de la Beac sont très loin des 200 voire 300% affichés à chaque opération il y a encore quelques années. « (…) Les émissions des mois de janvier et février ont eu des taux de couverture extrêmement faible, soit moins de 50% pour certaines émissions. Et j'espère bien qu'il s'agit d'une situation conjoncturelle », a confié le ministre des Finances le 17 février 2022 à Douala.
Louis Paul Motazé est venu dans la capitale économique rencontrer les investisseurs des marchés monétaire et financier afin de leur présenter le programme de mobilisation des financements de l’Etat, pour le compte de l’exercice budgétaire 2022. Ce dernier entend mobiliser sur ce marché, une tranche des 350 milliards de FCFA autorisés par la loi de Finances 2022. Cette ambition est d’autant plus ferme que Louis Paul Motazé n’est pas convaincu par les raisons invoquées pour justifier cette baisse d’attractivité des titres camerounais sur le marché monétaire.
« Mes collaborateurs m'ont néanmoins donné quelques éléments de réponses, que j’ai trouvés peu pertinents. Il s'agirait entre autres du rapatriement imminent dans le Compte unique du Trésor (CUT), des dépôts des administrations dans les banques commerciales. Il convient de rappeler ici qu'il s'agit d'un engagement pris par le gouvernement dans le cadre du nouveau programme économique et financier conclu avec le FMI. Je puis vous rassurer que ce rapatriement devrait se faire de manière progressive sans ébranler le système financier », a indiqué le ministre des Finances.
Au demeurant, en dépit de ces assurances du ministre Motazé, il est difficile de démentir l’incidence du Compte unique du Trésor sur la trésorerie des banques commerciales et les placements effectués par ces dernières sur le marché des capitaux sous-régional. En effet, dès le mois de mars 2022, les entités publiques et autres collectivités territoriales décentralisées vont intensifier le rapatriement dans le compte unique du Trésor, de tous leurs avoirs dans les banques locales. A fin août 2020, ces avoirs étaient estimés à 976 milliards de FCFA (contre 1129 milliards de FCFA en 2017) par le ministère des Finances. La proportion à rapatrier cette année-là était de seulement 150 milliards de FCFA, selon les données du FMI.
Avec les rapatriements effectués en 2021 (le montant n’a pas été révélé) et l’accélération annoncée au cours de l’année 2022 courante, il est indéniable que les établissements de crédit seront privés d’une bonne partie des dépôts. Ce qui devrait logiquement réduire leurs capacités opérationnelles sur les différents marchés.
Le phénomène ne devrait pas être visible qu’au Cameroun. Il sera ressenti dans l’ensemble de la zone Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Tchad, RCA et Guinée équatoriale), dont le Cameroun est la locomotive économique. A titre d’exemple, officiellement, les banques et autres investisseurs institutionnels installés au Cameroun fournissent aux Etats de la Cemac environ 70% des financements mobilisés sur le marché des titres publics de la Beac.
Brice R. Mbodiam
Lire aussi :