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Yaoundé - 06 mai 2024 -
Gestion publique

Fiscalité, inflation, électricité… : ces difficultés qui freinent les PME dans la transformation des produits locaux

Fiscalité, inflation, électricité… : ces difficultés qui freinent les PME dans la transformation des produits locaux

(Investir au Cameroun) - Dans son discours à la jeunesse le 10 février 2024, le président de la République, Paul Biya, a invité les jeunes à produire des biens et services pour limiter les importations qui obèrent la balance commerciale du Cameroun. Seulement, de jeunes promoteurs de PME éprouvent des difficultés dans la transformation de la matière première locale. Ils évoquent notamment la pression fiscale, la hausse des coûts des matières premières et du transport, l’insuffisance de l’énergie électrique et son coût élevé, le difficile accès aux financements et aux mesures d’accompagnement de l’État.

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Des difficultés qui font partie du quotidien d’Estelle Dora Keutchou. Promotrice de Compagnie des produits du terroir, une PME spécialisée dans la transformation des fruits locaux (ananas, papayes, mangues, etc.) en vin, cette ingénieure agroalimentaire de 26 ans dit être sous pression depuis la création de son entreprise en janvier 2022 à Logbessou, dans le 5e arrondissement de Douala, capitale économique du pays.

« Depuis deux ans, je dépense mensuellement 450 000 FCFA pour les charges (coût de production, loyer, électricité, eau, salaire de deux opérateurs non permanents) pour produire 200 bouteilles de vin », explique la jeune entrepreneure. Elle précise que 56% (252 000 FCFA) desdites charges sont consacrées à l’achat des matières premières, les bouteilles en verre, l’électricité et le transport dont les prix sont en hausse depuis le début de l’année en cours. Estelle Dora Keutchou affirme que la vente des 200 bouteilles de vin dans les grandes surfaces génère entre 600 000 et 700 000 FCFA. Ce qui permet de dégager une marge de 150 000 à 250 000 FCFA juste pour « se maintenir ».

Problèmes d’électricité

À en croire cette dernière, la grande difficulté reste l’insuffisance de l’électricité et sa cherté. Une situation qui met en danger son outil de production (acquis à 2 millions de FCFA) et rallonge les délais de production et de livraison de ses vins dont la marque phare est la « Cuvée des nobles », un vin blanc moelleux dont la bouteille est vendue à 4000 FCFA dans les grandes surfaces. Face au problème de l’électricité, la jeune promotrice pense à acquérir un générateur électrique, même si elle redoute une augmentation de ses charges du fait du récent réajustement de 15% des prix du super et gasoil.

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Comme Estelle Dora Keutchou, Astrid Ndangang se plaint également de l’insuffisance de l’énergie électrique qui plombe sa production. « L’électricité nous coûte déjà assez et lorsqu’il y a délestages, nous ne sommes pas informés pour planifier nos productions. Cela crée un manque à gagner conséquent », dénonce la promotrice de Yeülah, une PME spécialisée dans la transformation du poisson d’eau douce en saucissons de poissons depuis cinq ans. Pour suppléer ce problème d’électricité, elle compte aussi se doter d’un générateur électrique, car « c’est la seule solution pour tenir ».

En plus des délestages, cette ingénieure de conception en transformation et contrôle qualité des produits halieutiques dit être confrontée à une inflation généralisée depuis près de deux ans. « Les prix du poisson (kanga, silure, machoiron) ont flambé auprès de nos fournisseurs (pécheurs, pisciculteurs) qui se plaignent de la flambée des intrants. Du coup, ils les imputent sur le coût de vente du poisson », explique la jeune patronne de 32 ans qui emploie cinq personnes. Avec des coûts de production journalière de 500 000 FCFA pour 80 kg de saucissons, « le saucisson de poisson de 200 g qui coûtait 1500 FCFA en 2022 est vendu à ce jour à 1800 FCFA, soit une augmentation de 300 FCFA », précise Astrid Ndangang. Ce qui obère la compétitivité de son produit.

Difficile accès à la garantie de l’État

Autre difficulté commune aux deux promotrices de PME, c’est la pression fiscale. Même si leurs entreprises évoluent sous un régime simplifié, ces jeunes patronnes se plaignent du coût élevé des impôts. Si Estelle Dora Keutchou déclare débourser 340 000 FCFA par an d’impôts pour un chiffre d’affaires mensuel oscillant entre 450 000 et 500 000 FCFA, Astrid Ndangang déclare payer plus sans avancer de chiffres. Malgré un climat des affaires qu’elles jugent difficiles et l’inaccessibilité des mesures d’accompagnement (financement, exonérations des taxes, etc.) de l’État, ces dernières résistent et veulent augmenter leurs productions.

Le gouvernement a pourtant annoncé le déblocage de 200 milliards de FCFA de garantie pour soutenir les entreprises. Mais pour les deux promotrices, l’accès à cette garantie reste difficile. « Lorsque vous approchez votre banquier qui doit soumettre votre dossier pour obtenir cette garantie, il multiplie des subterfuges », soutiennent plusieurs promoteurs de PME. Estelle Dora Keutchou et Astrid Ndangang exhortent plutôt l’État à limiter ou à surtaxer les importations des produits déjà subventionnés qui crée une concurrence déloyale aux produits locaux. Pour ces dernières, les pouvoirs publics peuvent aussi apporter un soutien aux producteurs locaux en leur accordant des allègements fiscaux pour importer des équipements à moindre coût, en vue de produire à grande échelle localement, créer de la valeur ajoutée et des emplois. Il faut néanmoins souligner que tout ceci est déjà la place dans certaines filières.

Frédéric Nonos

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