(Investir au Cameroun) - Selon les données de l’Office national du cacao et du café (ONCC), seulement 21,17% des achats de fèves de cacao ont été effectués dans la région du Sud-Ouest du Cameroun, au cours de la campagne cacaoyère 2022-2023. Aussi, en comparaison avec la saison précédente, cette région a-t-elle « enregistré une baisse significative des volumes déclarés de 40%, soit 39 809 tonnes », a révélé l’ONCC le 7 septembre 2023 à Ngomedzap, dans la région du Centre, lors du lancement de la campagne cacaoyère 2023-2024.
Cette entreprise publique n’explique pas les raisons de la dégringolade des achats de cacao dans cette partie du Cameroun. Mais, l’on sait que depuis fin 2016, cette région anglophone du Cameroun fait face à une crise socio-politique, qui paralyse les activités économiques. Pour fuir l’insécurité installée par les milices sécessionnistes qui revendiquent l’indépendance des deux régions anglophones du Cameroun (Sud-Ouest et Nord-Ouest), des négociants traditionnels de ce bassin de production tel que Telcar Cocoa ont dû délocaliser certaines de leurs activités.
Dans le même temps, Telcar Cocoa a racheté, au cours de la saison cacaoyère 2021-2022, 100% des actifs des Ets Ndongo Essomba. Le négociant local de la firme américaine Cargill prenait ainsi davantage pied dans le bassin de production du Centre, qui, dans l’intervalle, a chipé à la région du Sud-Ouest son leadership d’antan dans la production cacaoyère au Cameroun (54,4% des achats enregistrés dans cette région au cours de la dernière campagne).
Classée finalement 2e bassin du pays depuis au moins trois campagnes cacaoyères, la région du Sud-Ouest, en dehors de la crise socio-politique, qui en plus des négociants de fèves a vu nombre de ses producteurs prendre le chemin de l’exil vers d’autres régions du Cameroun, paye également depuis des années le tribut des exportations frauduleuses de sa production vers le Nigéria. Selon les officiels, le phénomène a même pris de l’ampleur au cours de la dernière saison, engendrant une perte de production que l’ONCC estime à environ 40 000 tonnes.
Pour tenter de freiner ces exportations massives et illégales vers le Nigéria, le ministère du Commerce a dû interdire, à un mois de la fin de la campagne 2022-2023, toute exportation de fèves vers ce pays voisin. Après avoir enregistré des manque-à-gagner estimés par le ministre Mbarga Atangana à « près de 10 milliards de FCFA, en termes de droits de sortie et de redevance à l’exportation, et une perte sèche, au titre du rapatriement des devises, d’environ 60 milliards de FCFA », ainsi que le révèle le membre du gouvernement dans sa lettre circulaire du 13 juin 2023 annonçant l’interdiction des exportations vers le Nigéria.
Brice R. Mbodiam
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