(Investir au Cameroun) - Le Syndicat des industriels du Cameroun (Syndustricam), l’Association des sociétés d’assurances du Cameroun (Asac), le Cercle d’affaires français du Cameroun (Cafcam), la Chambre de commerce européenne au Cameroun (Eurocham) et la Chambre de commerce du Royaume-Uni au Cameroun (Ukcham) demandent « une suspension à effet immédiat » de l’application des mesures fiscales aux revenus des salariés contenues dans la Loi de finances 2024. L’information est contenue dans une correspondance adressée le 10 janvier au ministre des Finances (Minfi), Louis Paul Motaze (photo). Dans cette correspondance qu’Investir au Cameroun a pu consulter, ces associations et chambres de commerce sollicitent une audience avec le Minfi « afin qu’une concertation puisse être menée pour circonscrire cette importante réforme fiscale dans des limites préservant la paix sociale ».
Ces organisations se disent inquiètes de l’impact de ces nouvelles mesures fiscales sur les salariés des entreprises du secteur formel qu’ils regroupent. « Ceux-ci sont en effet très lourdement impactés au niveau de leur impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) par les modifications combinées des articles 33 et 34 du CGI résultant de la Loi de finances 2024. Ces nouvelles dispositions fiscales génèrent une augmentation très substantielle de l’imposition des salariés, et donc, corrélativement, une forte diminution de leurs revenus nets disponibles, après retenue à la source de l’IRPP et autres impôts, taxes et cotisations effectuées par leurs employeurs », déplorent-ils.
Parmi ces nouvelles dispositions, il y a l’élargissement de la liste des avantages en nature soumis à l’IRPP. Les avantages en nature offerts à certains travailleurs, qui étaient jusqu’à présent soumis au barème d’imposition à l’IRRP, étaient le logement (15%), le véhicule (10%), la domesticité (5% par domestique), l’eau (2%) et l’électricité (4%). L’État a ajouté le téléphone (5%), le carburant (10%), le gardiennage (5%) et Internet (5%).
À côté de cette mesure, le gouvernement, dans la loi de finances 2024, consacre également le plafonnement à 4,8 millions de FCFA par an (soit 400 000 FCFA par mois) de l’abattement forfaitaire fixé à 30% du salaire brut annuel. Mais « seuls les salaires supérieurs à 1 333 000 par mois sont concernés par cette limitation », précise la circulaire sur l’exécution de la loi de finances 2024 de l’État, signée le 29 décembre 2023 par le Minfi.
Salaires de janvier
« Ces taux surévalués par rapport à la charge réelle et aux salaires moyens des bénéficiaires participeront d’une augmentation substantielle de la fiscalité sur les salaires. D’autre part et surtout, si le plafonnement de la déduction du forfait de 30% au titre des frais professionnels, impacte les seuls revenus (avantages en nature compris) supérieurs à 1 333 000 FCFA/mois, il n’en est pas de même des indemnités versées en numéraires représentatives d’avantages en nature (incluant les anciens avantages tels que le logement) qui devraient désormais être fiscalisées pour leur montant réel et non plus en fonction des taux forfaitaires, ce qui permettait jusqu’ici d’en atténuer leur coût fiscal. En effet, ces indemnités en numéraires sont perçues sur bulletin de paie par de très nombreux salariés aux revenus modestes. L’indemnité logement peut d’ailleurs très souvent procéder des Conventions collectives du travail », arguent-ils.
« Nous faisons donc part de notre inquiétude en cas d’application de cette hausse de la pression fiscale impactant une large majorité des salariés du secteur formel, et obérant sensiblement leur pouvoir d’achat dans un contexte économique dégradé et fortement inflationniste au cours de la période passée et suivant les projections de l’année 2024 », écrivent-ils. Ils souhaitent rencontrer Louis Paul Motaze pour lui présenter « toutes précisions complémentaires relatives aux impacts réels de ces mesures pour les salariés », compte tenu de « l’imminence des paies toujours sensibles du mois de janvier ».
Patricia Ngo Mgouem
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