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Yaoundé - 03 mai 2024 -
Gestion publique

Riz, poisson, blé : le Cameroun se prive de près de 1 000 milliards de FCFA d’impôts en 7 ans pour maitriser les prix

Riz, poisson, blé : le Cameroun se prive de près de 1 000 milliards de FCFA d’impôts en 7 ans pour maitriser les prix

(Investir au Cameroun) - Afin de rendre disponibles et à des prix abordables des produits tels que le riz, le poisson et le blé rentrant dans la fabrication du pain, le gouvernement camerounais a dû concéder aux opérateurs économiques de ces filières une dépense fiscale globale de 980 milliards de FCFA, au cours de la période de 7 ans allant de 2016 à 2022. L’information est révélée dans un exposé présenté ce 29 janvier 2024 à Yaoundé par la direction générale des Impôts (DGI), à l’occasion de la conférence annuelle des services centraux, extérieurs et déconcentrés du ministère des Finances.

Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), « les dépenses fiscales sont des mesures particulières dérogeant au système fiscal de référence (SFR), qui occasionnent des pertes de recettes pour l’État, dans le but de susciter un comportement économique particulier de la part des contribuables, ou de subventionner certains groupes sociaux ». Dans le cas d’espèce, dans l’optique de garantir par exemple l’approvisionnement du marché camerounais en riz et de s’assurer que les prix pratiqués par les commerçants sont à la portée de la majorité, le gouvernement camerounais se prive chaque année de 52 milliards de FCFA d’impôts, selon la DGI. Ces pertes résultent de la taxation à taux réduit (5% au lieu de 20%, après une exonération qui aura duré de 2008 à 2016) des importations de ce produit alimentaire, parmi les plus consommés dans le pays.

Ce même mécanisme appliqué aux importations de poissons fait perdre à l’État 58 milliards de FCFA chaque année, contre 30 milliards de FCFA pour les importations de blé, apprend-on officiellement. Calculette en main, la dépense fiscale concédée par le gouvernement sur ces trois produits dits de première nécessité atteint 140 milliards de FCFA chaque année, ce qui correspond à une enveloppe totale de 980 milliards de FCFA entre 2016 et 2022. Compte tenu du poids de cette enveloppe, qui handicape le Trésor public pourtant porté vers une mobilisation plus accrue des recettes non pétrolières, le gouvernement camerounais songe de plus en plus à réduire ces dépenses fiscales, voire à les supprimer. Surtout dans un contexte de promotion de l’import-substitution.

« Il sera question entre autres pour le gouvernement de procéder à une revue systématique de toutes les dépenses fiscales existantes, en vue de la suppression des exonérations fiscales inefficaces ou peu pertinentes, au regard de l’évolution des politiques publiques. Par exemple, l’accompagnement de la politique d’import-substitution voulue par le gouvernement impose que les exonérations sur certains produits, qui grèvent en balance commerciale et sont ciblés dans le cadre de cette politique, tels que le riz, le poisson et le blé, soient aujourd’hui réduites ou progressivement supprimées », avait annoncé le 5 juillet 2022 le ministre des Finances, Louis Paul Motazé, lors du Débat d’orientation budgétaire (DOB), préparatoire à l’élaboration du projet de la loi de finances 2023.

Dans la loi de finances 2024, les riz parfumé et précuit et certains types de poisons (saumon, poissons d’ornement, morues, etc.), considérés comme des produits de luxe, ont été soumis au droit de douane normal de 20%. Mais le riz en brisures et les poissons de grande consommation comme le maquereau restent soumis au taux réduit de 5%. La réduction des exonérations sur ces produits, qui reviennent dans le discours gouvernemental depuis au moins 2019, reste donc timide. Pour le grand bonheur des consommateurs, qui pourraient connaître une érosion de leur pouvoir d’achat, en raison de la hausse des prix que va engendrer la restauration d’une taxation normale des denrées de première nécessité susmentionnées. Dans une note sur l’économie camerounaise datée de 2020, le Fonds monétaire international (FMI) semble mieux comprendre les hésitations du gouvernement à réduire la dépense fiscale sur ces produits. « Compte tenu de la situation sécuritaire et sociopolitique, il est délicat de les réduire », estime l’institution de Bretton Woods.  

Brice R. Mbodiam

Lire aussi :

11-07-2022 - Importations du riz, poisson et blé : le Cameroun ressuscite son projet de suppression des exonérations fiscales

27-08-2021-Impôts sur la consommation : au Cameroun, les exonérations (351,7 milliards de FCFA en 2019) profitent plus aux riches (DGI)

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