(Investir au Cameroun) - Dans une note signée le 3 avril 2023, le directeur général des douanes du ministère des Finances, Fongod Edwin Nuvaga, informe ses collaborateurs et les usagers que « sur très haute instruction de monsieur le président de la République (Paul Biya, NDLR), les opérations d’importation du fer à béton restent interdites jusqu’à nouvel ordre ». Cette note de rappel à l’ordre survient dans un contexte où les métallurgistes locaux se plaignent sans cesse de pertes de parts de marché sur les grands projets d’infrastructures, pour lesquels certains prestataires réussissent souvent à obtenir des « autorisations exceptionnelles » d’importation de fer, malgré l’interdiction qui frappe cette activité depuis 7 ans.
En effet, depuis l’année 2016, à la faveur des investissements consentis par les industries locales de transformation de l’acier, qui permettent désormais de couvrir la demande locale de fer à béton et même d’exporter dans la zone Cemac, le gouvernement camerounais a formellement interdit les importations de fer à béton. Mais, cette mesure de sauvegarde de la filière locale est régulièrement mise à rude épreuve par certaines entreprises du BTP réalisant de grands travaux d’infrastructures dans le pays, au moyen d’importations d’importantes quantités de ce matériau de construction.
Ce phénomène a été observé sur de grands projets tels que la 2e phase du chantier de construction du port en eau de Kribi, dans la région du Sud, ou encore la construction du barrage de Nachtigal (420 MW), dans la région du Centre. Face aux récriminations des producteurs locaux, en 2020, par exemple, le gouvernement avait d’ailleurs apposé des scellés sur une cargaison de 7 300 tonnes de fer à béton illégalement importées par le chinois CHEC, dans le cadre du projet de construction du port en eau profonde de Kribi.
Pour justifier ces importations parfois frauduleuses, ou alors bénéficiant des « autorisations exceptionnelles » délivrées par certaines administrations, en dépit des mesures restrictives décidées par le gouvernement depuis 2016, les prestataires des travaux de construction ainsi mis à l’index invoquent généralement la nécessité d’utiliser des matériaux respectant des normes spécifiques, inexistantes au Cameroun. Un argument que balaient d’un revers de la main les producteurs locaux, qui n’hésitent généralement pas à produire des attestations de conformité de leurs produits délivrées par des laboratoires indépendants, dont le Laboratoire national de génie-civil (Labogénie).
« Ce fer à béton, que certains tentent d’incriminer aujourd’hui pour des desseins inavoués, a pourtant fait ses preuves sur des chantiers tels que le 2e pont sur le Wouri, les stades d’Olembé et de Japoma, ou encore des barrages hydroélectriques construits ces dernières années dans le pays », fait remarquer un habitué des chantiers d’infrastructures.
BRM
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