Le ministère camerounais de l’Economie a lancé le 7 février 2014, un nouvel «appel public international à manifestation d’intérêt pour un contrat de partenariat pour l’exploitation et la maintenance du terminal conteneurs au port en eau profonde de Kribi». Cette nouvelle procédure de recrutement d’un concessionnaire du terminal à conteneurs du port en au profonde de Kribi intervient après l’annulation, en janvier 2014, du lot 2.1 de l’appel d’offres de 2008 relatif à la même prestation.
Une annulation préjudiciable au groupe Bolloré Africa Logistics qui, avait appris l’agence Ecofin de sources proches du dossier, était seul à avoir soumissionné pour cet appel d’offres, sur les cinq entreprises ayant manifesté leur intérêt pour ce marché au départ. Au rang de celles-ci, la société Maersk et un groupement conduit par le belge Jan de Nul.
La réouverture de la compétition pour la concession du terminal à conteneurs de ce qui sera le plus grand port du Cameroun et probablement de toute la côte ouest-africaine, ouvre la porte à une nouvelle bataille entre Bolloré et Necotrans, devenu son éternel rival sur les ports africains.
En effet, Si chez Bolloré Africa Logistics l’on confirme vouloir repartir à l’abordage pour décrocher ce contrat après l’annulation du dernier appel d’offres, le groupe Necotrans, qui n’a pas concouru en 2008, a clairement manifesté son intérêt pour la concession de ce terminal au sortir d’une audience accordée à son DG, Gregory Querel, à la présidence de la République du Cameroun en avril 2013.
Selon l’appel public lancé par le gouvernement camerounais, les candidats à la concession de ce terminal doivent déposer leurs dossiers au plus tard «cinq semaines après la publication dans la presse de l’appel à manifestation d’intérêt». Le document gouvernemental a été rendu public pour la première fois le 7 février 2014.
A l’issue de cet appel à manifestation d’intérêt, apprend-on, une short-list «d’au plus 5 candidats» sera établie et ces derniers participeront à un appel d’offres restreint pour la présélection de trois candidats devant participer au dialogue de pré-qualification, qui va précéder la négociation du contrat. Cette longue procédure, renseigne un expert des procédures de passation des marchés au Cameroun, devrait durer 19 mois au minimum, alors que l’accostage du premier navire au port en eau profonde de Kribi est prévue pour le mois de juin 2014. C'est-à-dire dans quatre mois.
BRM
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Pour la seconde fois en 10 jours, le Premier ministre camerounais, Philémon Yang, a publié le 22 janvier 2014 dans le quotidien gouvernemental, Cameroon Tribune, un communiqué déclarant «infructueux» le marché pour le «financement, la construction et l’exploitation du terminal à conteneurs du port en eau profonde de Kribi». Le chef du gouvernement camerounais invite par ailleurs «le soumissionnaire» à «passer retirer sa soumission sous quinzaine».
Selon les sources de l’agence Ecofin, ce soumissionnaire n’est autre que le groupe Bolloré Africa Logistics, dont l’une des entreprises, Douala International Terminal (DIT), est déjà concessionnaire du terminal à conteneurs du port de Douala. L’identité de ce soumissionnaire est d’autant plus connue qu’au cours d’une conférence de presse donnée à Yaoundé le 26 février 2013, en marge d’une cérémonie de mise en service de nouvelles locomotives acquises par Camrail, Dominique Laffont (photo), président de Bolloré Africa Logistics, avait clairement indiqué à la presse que le groupe qu’il dirige avait soumissionné pour la concession du terminal à conteneurs du port en construction à Kribi.
Le revirement du gouvernement
Le 18 juin 2013, le ministre camerounais de l’Economie, Emmanuel Nganou Djoumessi, avait mis un terme aux supputations sur l’identité de l’entreprise qui s’adjugera le contrat de concession du terminal à conteneurs du port en eau profonde de Kribi, en publiant dans le quotidien gouvernemental, une liste d’entreprises retenues pour réaliser certains projets en cours dans le pays, sous le modèle PPP (partenariat public privé). Dans ce communiqué, le ministre Nganou Djoumessi révélait que les travaux de construction du terminal polyvalent au port en eau profonde de Kribi seront effectués par Bolloré Africa Logistics.
Que s’est-il donc passé entretemps, pour que l’appel d’offres pour lequel un adjudicataire avait déjà visiblement été choisi soit ensuite déclaré infructueux ? Selon certaines sources proches du dossier, le revirement de la partie camerounaise tient du désir d’éviter le monopole dans la gestion des terminaux à conteneurs des deux plus grands ports du pays, Bolloré étant déjà opérationnel au port de Douala.
D’autres sources évoquent l’existence d’une offre finalement jugée plus intéressante, venant d’un concurrent plutôt bien connu par le groupe Bolloré. Il s’agit, apprend-on, du français Necotrans. L’on se souvient qu’au cours d’une audience à lui accordée par le secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, en avril 2013, le DG de Necotrans, Gregory Querel, bien que s’étant appesanti sur le projet d’un «nouveau schéma d’infrastructures portuaires au port de Douala», n’avait pas caché son intérêt pour le terminal à conteneurs du port en eau profonde de Kribi.
La revanche de Necotrans ?
L’arrivée probable de Necotrans sur le futur port en eau profonde de Kribi, qui attend son premier navire au premier semestre 2014, prendrait des allures de revanche, après la bataille que cet autre opérateur français à perdu devant Bolloré sur le terminal à conteneurs du port de Conakry, en Guinée. En effet, déclaré concessionnaire du terminal à conteneurs du port de Conakry suite à un appel d’offres gagné devant les concurrents, Necotrans a vu son contrat résilié et attribué à Bolloré dès l’arrivée au pouvoir du président Alpha Condé.
Face à cette décision, Necotrans avait dû assigner le groupe Bolloré devant le tribunal de commerce de Nanterre, en France, pour «concurrence déloyale et parasitisme». Le 10 octobre 2013, le tribunal de commerce de Nanterre a rendu la décision obligeant le groupe Bolloré à verser deux millions d'euros (environ 1,3 milliard de francs Cfa) au groupe Necotrans, somme représentant le coût des travaux réalisés par son partenaire Getma, avant que la concession ne soit finalement attribuée à Bolloré Africa Logistics.
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10/10/2013 - Guinée : Bolloré condamné à payer deux millions d'euros à Necotrans